Boris Bidjan Saberi, le designer Germano-Iranien, sort un livre.
On pourrait lui reprocher son arrogance quant à la maturité de sa marque du même nom âgée de seulement 7 années. Néanmoins il faut se rendre à l'évidence: BBS produit des vêtements de grande qualité doublés d'une recherche esthétique marquée. A force d'expérimentations sur les traitements, les coupes, les textiles et méthodes utilisés, BBS s'est imposé comme un designer incontournable du vêtement de luxe.
Que ce soit le cuir translucide, la pigmentation à base de sang animal, le traitement à l'acide... BBS repousse les limites du monde de la mode, travaille les textures, les marie, leur donne forme puis vie dans des coupes magnifiant la silhouette et protégeant l'épiderme du détenteur. C'est dans son atelier du nord de Barcelone, accompagné de quelques autres artisans, qu'il confectionne la plupart des pièces de sa marque à la main (il semblerait que les sneakers BBs soient produites en Italie dans les ateliers de la marque A1923, ce qui ne laisse aucun doute sur la qualité de fabrication, Augusta (Simone Cecchetto) étant une des marques les plus prestigieuses en matière de chaussures de luxe), son travail étant une union de procédés de fabrications ancestraux mêlés à une approche urbaine très street-wear.
Le livre retrace les collections sorties depuis 2008 (j'ai personnellement une forte préférence pour la collection FW2010 avec les capuches surdimmensionnées des trenchs 3/4), les techniques utilisées, les shows à travers le monde, son atelier à Barcelone etc...
Le livre est beau, très beau. Les photos sont superbes et détaillées, bien sur il faudra savoir lire ou l'italien ou l'anglais pour tirer pleinement profit d'un tel ouvrage, mais le contenu est dense (208 pages) et sied à merveille dans ma librairie comme une petite oeuvre d'art.
Cependant BBS pratique des tarifs très élevés (300 euros pr un t shirt, parfois 3000 euros pour une veste en cuir) le plaçant directement dans la catégorie Rick Owens, Carol Christian Poell, A Diciannoveventitre, MA+ etc... Mais sans savoir exactement pourquoi et même en respectant énormément son travail, je ne peux m'empêcher de trouver son univers surfait au contraire du designer Carol Christian Poell qui reste à mes yeux LE maître incontesté de l'avant gardisme vestimentaire. Je trouve que BBS en fait trop (il sort actuellement une nouvelle ligne de vêtements sportswear sous le nom "11"), se montre trop, copie trop (11 est à l'image de Rick Owens DRKSHDW et bcp de bottes ressemblent aux collections CCP et A1923...) et enfin perd en originalité et intérêt (les dernières collections se veulent plus tape à l'oeil que réellement portables) ces dernières saisons tout en continuant à impressionner par le rendu visuel des textiles.
Je finirai donc sur cette phrase du maître CCP qui exprime pleinement la plus pure passion du vêtement sans son folklore :
"I prefer not to analyse myself, I find fabrics are more interesting. Fabric always comes first. I do not see the point of participating in the “glamourization” of fashion designers, if you want to achieve that, you are better off becoming a pop star. I prefer not to present my clothes in a show because it has nothing to do with the garments. A show means theatre and takes the attention away" Carol Christian Poell.
Pour avoir une idée des rendus et du fameux cuir transparent :
http://www.bbc.co.uk/news/world-europe-13912738