Immersion, c'est bien le mot. Un journaliste passe des mois au 36, et suit trois dossiers sordides, des assassinats dont l'auteur est inconnu. Et nous voilà suivre les enquêtes comme si on y était, grâce aux magnifiques dessins de Titwane, sorte d'urban sketcher tout-terrain qui se faufile d'un bureau à l'autre pour saisir ambiance et physionomies dans cette vieille maison aux rambardes curieusement éloquentes. Après SK1, cet excellent film consacré à la traque de Guy Georges, le "tueur de l'Est parisien", on retrouve les locaux de la criminelle avec une sorte de sentiment de familiarité, comme si nous, citoyens français, considérions l'institution et le bâtiment comme notre patrimoine intellectuel, culturel et humain. C'est un peu ça, finalement, et ce livre-témoignage nous permet de prendre part à toutes ces démarches codifiées qui doivent mener à la manifestation de la vérité. Parce que ça compte, ça, même aujourd'hui, même quand la com' s'insinue partout et dénature tout. Avec les équipes du 36, on veut que les saligauds qui ont défiguré un peintre soient traînés en justice, que ces Thénardier minables qui se débarrassent d'un ex-mari gênant sans le moindre scrupule arrivent devant un tribunal,que les mafieux qui sévissent en toute impunité dans les rues soient mis hors d'état de nuire ou que les margouillats qui nous escroquent au quotidien finissent par tomber sur un os. Nous voilà donc partie prenante, nous, lecteurs, et c'est la grande force de ce volume dense et profond, qui mélange harmonieusement texte et dessins, reconstitutions et retranscriptions, dans un va-et-vient fertile. C'est décidé, je me rue sur les autres ouvrages de la série chez mon petit libraire au goût très sûr. Merci à lui pour cette découverte !