Lu en Décembre 2021. Éd 2010. 7,5/10


C'est un dur métier que l'exil m'a permis de rencontrer la poésie de l'auteur turc Nazim Hikmet. C'est un recueil en vers libres parsemé de très jolis poèmes sur le communisme, l'humanité, l'optimisme, la mort et la bombe atomique, la poésie et évidemment l'exil.
J'aurais tendance à penser que le recueil souffre beaucoup de la traduction, particulièrement mutilatrice avec la poésie.
Ainsi, peu de vers sont sublimes, marquants, tranchants contrairement à ceux de Hugo que j'ai lu précédemment. Mais c'est peut-être aussi le cas dans la langue originale ; Hikmet a écrit une poésie qui se veut sans ambages, populaire, accessible, communiste en somme. Le sublime (et son pendant grotesque) n'a peut être pas sa place dans une poésie de cet ordre.
"Il voulait atteindre ce degré de dépouillement et de transparence qui vise à opérer la jonction entre la sensibilité individuelle et la conscience de tous." (p14 - Préface)


Ce qu'il a écrit de meilleur pour moi reste donc ses poèmes ancrés dans l'instant, des poèmes contemplatifs et impressionnistes, souvent très courts mais qui ne se complaisent pas dans la réflexion métaphysique comme il le fait parfois (poèmes qui manquent de portées dans des pièces artistiques si brèves).
Au final, jamais je n'aurai lu de la poésie turque si on ne m'y avait pas forcé et c'est une vraie ouverture à la littérature-monde que de l'avoir fait. Néanmoins, malgré un ensemble très élégant, j'ai largement manqué d'affect et de transcendance, deux sentiments que je recherche aujourd'hui quand je lis de la poésie.


Je partage plus bas mes notes sur les plus beau poèmes :


Sur ma poésie : 9,0
C'est toujours joli la définition de sa propre poésie. Ici, c'est son "miel".


Gabriel Péri : 9,0
Portrait d'une vie comme il y en a tant dans les Châtiments mais cette fois, éloge sobre et presque factuel de la vie d'un communiste, futur résistant abattu pour son amour de la France.
"Le communisme est la jeunesse du monde, il prépare les lendemains qui chantent."


Lettres et Poèmes (1942-1946) : 9,0
Lettres et poèmes de prison adressés à sa femme. De très belles déclarations d'amour, à son amour, la nature, le futur.
Une très belle expression du bonheur des rêves dans le III.
"La plus belle des mers / est celle où l'on n'est pas encore allé. / Le plus beau des enfants / n'a pas encore grandi. / Les plus beaux jours / Les plus beaux de nos jours / on ne les a pas encore vécus. / Et ce que moi je voudrais te dire de plus beau / je ne l'ai pas encore dit."


Don Quichotte : 9,0
Hommage à la passion de Don Quichotte pour les valeurs et les belles croyances qui lui tiennent à cœur.


Impression : 9,0
Saisie impressionniste d'un instant en bord de mer.


Depuis que je suis là-dedans !... : 9,0
Très beau poème, un des plus tristes jusque là, première évocation de la bombe atomique. Le monde qui tourne sans nous quand on est en prison, c'est très évocateur comme idée.
"Dix fois le monde a tourné / autour du soleil / depuis que je venu choir / dans cette prison [...] Ils ont aujourd'hui dix ans / tous les enfants/ tombés du ventre de leur mère / L'année même où je suis tombé dans cet enfer.


Berceuse : 9,0
"Do,do" une berceuse qui est une courte invitation aux voyages des rêves.


Élégie pour Sheytan : 9,0
Élégie à son chien décédé. Dit en peu de mots la dureté de la vie et la bonté du chien.
"Sheytan, tel était le nom de mon chien / Était n'a rien à voir avec son nom / Rien n'est arrivé à son nom." -> C'est une incroyable façon de dire la mort.


Le facteur : 9,0
Lien avec la lettre à Memet qu'il ne recevra jamais bien qu'il soit facteur (dans la belle Hongrie), son rêve d'enfance.
"Dans la sacoche de mon coeur / J'ai apporté des nouvelles de l'homme / des nouvelles du monde et du pays / des nouvelles du loup de l'arbre et de l'oiseau/ Au point du jour / comme au cœur de la nuit / J'ai partagé entre les hommes ce courrier / j'ai fais mon métier de poète. / C'est ainsi que je fus facteur."


Chanson I - «C'est moi, c'est moi qui frappe à votre porte...» : 9,0
Ça fait toujours un autre effet quand les échos des sons rentrent en jeu.
Raconte la violence de la bombe atomique dans la bouche d'une enfant très douce, mais dans toute l'horreur des détails que cela implique.
"J'étais ici voici dix ans déjà / J'ai trouvé la mort à Hiroshima, / Je ne suis qu'une enfant, je n'avais que sept ans / Mais les enfants morts ne grandissent pas."


En passant par la Suisse : 9,0
Impressions et réflexions sur la Suisse par contraste entre ce havre de paix et le relatif désespoir qui règne autour.

Arimaakousei
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le 7 janv. 2022

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