130 pages de poésie brute et de rock n' roll qui colle aux docs

Dan, Mau et Gwenn, deux amis, une femme, une trahison. Mau et Gwenn surgissent du passé, avec l'idée d'un gros coup qui rapporterait beaucoup. Le dégoût de Dan pour sa vie terne et la société à laquelle il est incapable de s'intégrer le pousse à accepter de marcher avec eux. Le coup foire, Dan va se cacher sur un îlot désert. Seul face à lui-même sur ce bout de terre battu par les vents, il revient sur son passé, sur cette histoire qui a mal tourné.
Cavale Blanche, c'est 130 pages de poésie brute et de rock n' roll qui colle aux docs. 130 pages aussi où la Bretagne se montre (j'ai envie de dire "enfin !") sous le jour que j'aime, sans clichés, sans chichis folkloriques, avec des références qui nous parlent si bien ... Les Hespés, Kerlouan, Brest et ses excès, et puis la mer et les éléments qui souvent se déchaînent. Enorme, omniprésente, ici mauvaise, terrifiante et envoûtante sous la plume fiévreuse de Stéphane Le Carre qui donne à ce premier roman une maturité surprenante.
Ne vous fiez pas aux apparences, l'auteur exploite à sa façon à lui, assez magistrale je dois dire, les vieilles ficelles du roman noir que sont trio amoureux, trahison, coup foireux qui tourne mal ...
Un très bon premier roman, un vrai coup de coeur.

" En Bretagne, il semble exister un climat propice à ces cyclones qui tournoient, invisibles, dans les liquides d'alcool et aspirent d'un coup les êtres faibles. Pendant quelques heures, dans l'ivresse, dans la joie malsaine, la force maladroite, la colère atomique, les assoiffés ne sont plus des êtres abattus, ils sont des seigneurs, des lions, des hommes pensent-ils. Je sais cela. J'ai connu des rages fabuleuses dans des rades minuscules, à Brest, sous le nuage et ses tresses de pluie, agaçantes à force de familiarité. Dans la Volgograd atlantique à la laideur pleine de franchise, j'ai trouvé les tavernes où dansent tous les démons de l'alcool et de la furie. je m'y suis inventé des frères, des épées, des pays, des phrases, des illusions. Java était le nom de ce rivage qui paraissait neuf et exaltant à chaque fois mais dont les plages claires se révélaient à coup sûr des brisants impitoyables. Et ainsi j'ai bu jusqu'à ma dignité, oui, j'ai bu la distillation de ma honte, certains soirs. J'ai arpenté des chemins sinusoïdaux et inutiles, des escaliers aztèques et casse-gueule, la ville s'étirait sur des collines éphémères, j'ai chevauché des élans magiques et des migraines tragiques m'ont piétiné. Je me plaisais à hurler à hurler au milieu des amas de coudes qu'un homme qui trébuchait c'était peut-être un poète qui tombait. Ou un crétin."

"Dans la nuit, une bulle d'un silence intense me réveille. Quelque chose de fabuleux se tapit à l'extérieur, issu de la profondeur océanique. Ma jambe, avertie, palpite de douleur. Et puis, comme une langue qui goûterait la pierre, une rafale courte et aigre râpe le coin de l'abri. Une autre plus longue suit. Une troisième est comme ravalée d'un coup de glotte géante. Et l'instant d'après, le grand souffle déferle, hurlant, happant la maison dans une emprise vivante et sonore, poussant l'obstacle dans une lutte obstinée. La tempête vient de commencer."
Hurlalune
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le 16 août 2012

Modifiée

le 16 août 2012

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