Difficile de sortir complètement indemne de cette lecture qui explore la vie - souvent ponctuée d'évènements tragiques - des femmes chinoises, à travers une série de témoignages recueillis entre 1989 et 1997. Xinran nous offre à travers son livre un aperçu de ce que peut être la vie des Chinoises dans une société ayant subi de nombreux bouleversement politiques et sociaux pendant la deuxième partie du XXème siècle. Sans rentrer dans une analyse poussée, l'auteure s'interroge en même temps que le lecteur, afin de peindre une toile représentant la femme chinoise, à partir d'une série de témoignages touchant à des sujets extrêmement divers : le viol, l'inceste, la maternité, la perte d'un enfant, la pauvreté, le mariage, l'amour, etc.
Ce livre ne parle de féminisme à proprement parlé, mais directement de femmes. L'ignorance de Xinran, qui n'a pas osé tenir la main de son professeur à 22 ans de peur de tomber enceinte, est d'ailleurs elle-même frappante dès les premières pages du livre. À travers les pages, on la voit, pleine d'empathie, tâtonner pour comprendre mieux la femme chinoise. Ici, on ne parle pas des tenants et aboutissants de l'égalité entre hommes et femmes ou des avancées de la société chinoise dans ce domaine, on ne fait que relater des faits : des faits qui interrogent, choquent et percutent mais qui n'apportent pas réellement de réponse à toutes les questions que la lecture de ce livre engendre. Cela donne un tout à la fois frustrant et intéressant : on a envie d'en savoir plus que ce soit sur les femmes chinoises, sur la révolution culturelle, sur la Chine d'aujourd'hui, et tant d'autres sujets soulevés.
Quoi qu'il en soit, il est difficile de refermer ce livre sans avoir été touché. Si je ne me souviens pas du nom de chacune de ces femmes, ou de leurs histoires complètes, il y a certains passages que je ne pourrai pas oublier. Le dernier chapitre est probablement celui qui m'a le plus marqué en ce qu'il pose en même temps une question intéressante : Sommes-nous plus heureux tant que nous sommes dans l'ignorance de ce que nous n'avons pas? Et si oui, ceux qui savent doivent-ils laisser les autres dans l'ignorance ou bien partager leur connaissance de ce qu'ils considèrent comme une "vie meilleure"?