Je suis sociologiquement prédisposé à aimer Desproges : mes parents écoutent France Inter.
Par ailleurs, j'aime lire, j'ai remarqué au bout d'une douzaine d'années que quelque chose ne tournait pas rond dans la vie, et je suis né trop tard pour regretter que Desproges partît trop tôt.
Soit quatre choses qui m'ont fait lire (et écouter) et relire les "Chroniques de la haine ordinaire".
J'y ai appris qu'un texte peut être beau, et que la littérature commence précisément par le choix de tel mot plutôt que tel autre. J'ai découvert que l'implicite peut être bien plus meurtrier que l'explicite. J'ai réfléchi à ce qu'est la vraie vulgarité : pas dire "bite" ou "couille", mais porter une montre d'une certaine façon, par exemple. Je me suis fait un peu de culture générale, certes parfois datée : ces fameuses allusions à une actualité qui n'en est plus et qui montrent surtout que la bêtise, la vulgarité, la bassesse et le cynisme n'ont pas d'époque.
À propos de cynisme, il faut en distinguer deux chez Desproges : celui, apparent, qu'il manie ; et celui, ambiant, qu'il dénonce. On ne peut pas en dire autant de tous les humoristes.