Un recueil de nouvelles fantasques et enchanteresses.

Le don étrange de deux frères siamois, l’imagination bondissante d’un petit garçon surdoué soumis à la jalousie violente d’un grand frère psychotique, l’amour impuissant et le désenchantement des parents de Toutou le schizophrène, les rituels magiques d’un clochard qui cherche avec ses chiennes un abri pour la nuit : les personnages des nouvelles de «Cigogne» - enfants, êtres fantasques aux lubies étranges - semblent dotés du pouvoir de faire entrer, très naturellement, les rêves ou le surnaturel dans le quotidien, pour que leur existence reste belle malgré ses épisodes cruels.


«Nous sommes nés monstrueux et notre vie fut belle. Nous sommes nés au plein milieu d’un été admirablement chaud. Nuls signes mystérieux – pluies de crapauds, migrations de rats, passages de comètes à la ponctualité détériorée, naissances d’agnelles à six pattes ou tournée de saltimbanques – n’annoncèrent notre venue. Juste le cri de douleur de ma mère lorsqu’elle accoucha, et son silence obstiné lorsqu’elle nous vit.» (Siamois)


Cigogne, libellules ou lamas, iguanes et choucards, chiens et chats, les animaux présents à chaque page ne sont pas « autres » mais, compagnons de route et d’utopie, ils constituent cette part de fantaisie, de sauvagerie ou d’innocence issue de l’enfance, l’amplificateur des fragilités et des fantasmes des hommes.


«Ma maison est en haut d’une colline, au bout d’une rue isolée. D’autres maisons auraient dû être construites alentours, mais des raisons financières ont stoppé net les travaux. Ici, des sillons de tracteurs se remplissent d’eau, faisant office de mare avec têtards et faux moustiques, ceux qui marchent sur l’eau. Je connais les mouches, les moustiques et les libellules : les libellules sont comme les tigres. Elles sont belles, carnivores, et elles mangent les moustiques. Évidemment, je connais aussi les coccinelles ou les sauterelles, mais des insectes qui volent, je sais le nom de ces trois-là. Des cousins aussi, ils sont comme des moustiques, mais gros et stupides, qui volent mal. Je n’aime pas les cousins. D’ailleurs, les miens, je n’en ai pas. Il y a aussi des habitations à moitié construites, des bouts de mur qui font des forteresses idéales. J’y joue seul ou avec mes chiens, ou avec mon chat. Si ce n’est que mon chat joue rarement : il regarde ou il chasse. Mais il n’est jamais loin.» (Cirques)


A la lisère du fantastique, les nouvelles de «Cigogne» illuminent la gravité du quotidien des lumières des rêves et des contes.


Retrouvez cette note de lecture, et toutes celles de Charybde 2 et 7 sur leur blog ici :
https://charybde2.wordpress.com/2015/04/26/note-de-lecture-cigogne-jean-luc-a-dasciano/

MarianneL
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le 26 avr. 2015

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