Passe passe le oinj, passe passe le oinj, y a du mort-vivant sur la corde à linge...


Imaginez un monde où, après une épidémie venue d’on ne sait où, seuls les drogués auraient survécu ; le reste de la population ayant péri. Car oui, ici la drogue ça conserve !


Un "Trainspotting" zombiesque, un "Shaun of the Dead" sous meth', un "La Route" amphétaminé, c'est tout ça et bien plus "Déchirés".
Mais c'est avant tout un personnage principal très réussi. Peter Stenson a réalisé un superbe travail de caractérisation. Car on s'y attache à ce salopard de Chase Daniels, son « héros » junkie, sans foi ni vergogne, quand il s'agit de trahir ou voler ses camarades pour un instant de défonce supplémentaire. Fidèle dans son cœur mais incapable de résister à l'appel du shoot. Lâche et veule mais pourtant accompagné, il est affublé de Steno-John, son lunaire et obèse compagnon de défonce ("c'est le seul obèse camé qui reste obèse malgré la came") et de la belle Kay dont la seule proéminence se situe au niveau nasal. Filiforme donc, ses seules courbes sont les nœuds qui s'enroulent dans son cerveau. Au grand dam de Chase qui ne sait plus à quel sein se vouer. Ce qui n’empêchera pas Peter Stenson de nous composer une magnifique histoire d’amour autour de ces deux âmes abimées.
Crépusculaire et nihiliste, "Déchirés" parvient néanmoins à éviter l'écueil du tout-sordide et nous propose quelques jolies plages lumineuses ou, à défaut, des situations gaguesques qui valent le détour. Ne serait-ce que dans la description des personnages secondaires que notre trio de tête va croiser au fil des pages.
C'est d'ailleurs tout le roman qui est sous acide, les morts-vivants ne grognent pas, ils gloussent, ils ricanent ! Ce qui crée une ambiance moins effrayante au premier abord mais finalement aussi inquiétante au final.
Malgré un récit lorgnant sur le fantastique et l'horreur, le bouquin est écrit comme un roman noir. La bonne idée ! Si on enlevait l'aspect horrifique, on se retrouverait baigné dans un pur jus de noirceur avec ses personnages paumés à qui la vie n'a pas fait de cadeaux. Le style est donc à l'avenant, sans temps morts, sans fioritures, sauf quand Chase exprime ses sensations On adorera ses envolées lyriques à chaque fois qu'il s'imagine vivant, débarrassé des zombies, et prêt à vivre une vie de rêve.


C'est irrévérencieux, ça ne fait pas de promesse mais l'alchimie fonctionne. Alternant les moments de défonce et les courses-poursuites, Peter Stenson dose merveilleusement son intrigue, avec tantôt des descriptions oniriques et décalées de la défonce et tantôt, le palpitant qui s'affole, le pied qui s'agite et les malheurs qui s'abattent. Un régal !
Super8 est vraiment un super coup ! Qu'on se le dise ! 4/5
http://cestcontagieux.com/2016/02/18/dechires-de-peter-stenson-la-chronique-very-bad-trip/

David_Smadja
8
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le 19 févr. 2016

Critique lue 358 fois

David Smadja

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