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Séraphine vit tant bien que mal entourée de sa famille au Congo, tandis qu’une guerre civile ravage le pays. Mais tout bascule lorsque des miliciens saccagent son village, tuent et détruisent tout sur leur passage. C’est à ce moment-là qu’elle découvre réellement ce que c’est, la guerre. Un univers sans pitié où les plus forts massacrent, molestent et abusent tous ceux qui ne sont pas de taille à résister.


« Il ne faudrait pas créer la vie, voilà ce qu’il pense en se confrontant au regard de sa fille, immobile, sur le dos, le cou penché vers lui, on ne devrait vraiment pas créer la vie. »


Séraphine perd sur le coup sa famille, son avenir, son innocence et ses rêves. Mais au lieu de rester à terre, elle va se relever, poussée par une rage nouvelle, une colère insatiable. Elle va rejoindre l’armée régulière et devenir une "lionne impavibe". Aux côtés de femmes qui se tiennent debout malgré leurs ecchymoses, elle se battra, elle tuera, elle sauvera, elle aimera aussi - mais surtout, elle dansera sans cesse sous les bombes qui pleuvront sur elle.


« Vous ignorez ce qui brule, ce qui ronge, les muqueuses, la peau des cuisses. Vous ignorez les tambours du ventre quand les poings s’enfoncent. Vous ignorez, je vous envie. Je vous souhaite un quotidien sans encombre. »


« Nous n’avons jamais fini d’avoir tout à prouver. Il faut sans cesse recommencer, sans cesse tomber et se relever, sans cesse prouver que nous valons mieux que ce que, parfois, nous projetons dans le regard des autres. »


Séraphine est un personnage d'une rare force. Comment survivre après ce qu’elle a vécu. On admire sa rage de vivre, sa force impavide. Elle va trouver le courage de se relever et de se battre en devenant une guerrière, une lionne. Cette haine, cette rage, cette soif de tuer, qui brule au fond d’elle, nous fait un peu peur, et pourtant… on ne peut qu’aimer et admirer cette femme qui se consume et brule tout sur son passage.


« Quiconque étouffe mes mots, je le tue.
Ce n’est pas que c’est facile, mais à présent ça a l’air tellement plus abordable. Tuer est devenu une nécessité. Le sang glisse dans les mains, s’écoule entre les phalanges. On vomit son dégout. Puis on avance. »


Face à des journalistes, à des caméras, les différents protagonistes se confient, parlent de leur histoire. La construction du récit est donc particulière, ce qui donne encore plus d’ampleur au roman. Chaque personnage a sa profondeur, ses blessures, son passé. Mais ils sont tous animés par une même force indicible, cette même volonté de sauver avant même de se sauver soi-même. Je me suis attachée à chacun d’entre eux, mais j’ai une pensée particulière pour le docteur Bosango que j’ai aimé de tout mon coeur.


« Séraphine est une de ces femmes qu’on sous-estime parce qu’elles sont des femmes. On les peint fragiles et précieuses, mais on détruit ce qu’on pensait ériger au rang d’oeuvre d’art. »


Le style littéraire de l’auteure m’a entièrement conquise. Céline Lapertot a une plume poignante qui nous fait tressaillir, qui nous remue les tripes, qui nous bouleverse. Les mots sont précis et tombent justes. Des femmes qui dansent sous les bombes est un roman plein de courage et d’héroïsme ; un roman qui déborde d’émotions si fortes qu’elles nous transcendent et nous frappent en plein coeur. Ce récit d’une force et d’une rage abyssales ne peut nous laisser indemne. On est happé par l’histoire de cette femme qui se bat pour quelque chose de bien plus grand qu’elle.


« Une femme vient d’enfiler son uniforme et ses rangers, mais ce qui la surprends dans cette vision, c’est ce qui dort contre son dos. Un bébé sanglé à même l’uniforme, un bébé qui repose sa tête sur le vert caca d’oie, un bébé qui ne sait pas dans quel monde il a réussi à s’endormir paisiblement. »


Des femmes qui dansent sous les bombes est un chant, une danse, un hymne, qui redonne puissance aux femmes.

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le 12 mai 2016

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