Si l'épaisseur de « 2666 » fait peur, « Des putains meurtrières » est une magnifique porte d'entrée dans le monde de Bolaño.

Ce recueil de treize nouvelles, publié en 2001 impressionne par la palette immense des talents de Bolaño.

Démultiplié en Bolaño, Belano, B, l'auteur nous plonge au fil des pages, à travers tous les genres, dans les thèmes qui lui sont chers - les vies brisées par la dictature chilienne, l'exil, les rêves, la désillusion et la tendresse pour l'Amérique latine, l'errance et le lent naufrage de la vie, la folie et le mal ; Bolaño explore sans cesse la relation entre fiction et réalité, et la question de la création littéraire comme miracle ou fruit du hasard.

Un seul exemple – car on aurait envie de parler de toutes les nouvelles :
« Derniers crépuscules sur la terre » exprime admirablement l'affection et le dégoût de Bolaño pour son continent natal, et le passage du temps. C'est le récit d'une semaine de vacances de B. à Acapulco avec son père. B lit une anthologie des surréalistes français ; il reste accroché à la photo de Gui Rosey, poète médiocre disparu pendant la seconde guerre mondiale dans des circonstances inexpliquées, tandis que son père cherche à l'entrainer dans les bars et les boites à putes. B se laisse finalement faire sans rien dire, et pressent un désastre.

« Ils vont nous voler tout l'argent, pense B. Ensuite il regarde les femmes qui à leur tour les regardent, avec une commisération palpable. Elles savent ce qui va nous arriver, pense B. Tu es soûl ? lui demande son père pendant qu'il attend une carte. Non, dit B., je ne le suis plus. Tu es drogué ? dit son père. Non, dit B. Alors son père sourit et demande une tequila et B se lève et va vers le comptoir et de là il observe avec des yeux de fous la scène du crime. A ce moment-là, B sait que c'est le dernier voyage qu'il fera avec son père. »

Ces nouvelles sont treize perles, toutes uniques, qui laissent une forte trace intérieure.
MarianneL
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le 27 mai 2012

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