Quel ne fut pas mon étonnement quand, récemment de passage à Paris, je me suis retrouvée nez-à-nez dans le métro avec l'infante Marguerite-Thérèse d'Espagne, future impératrice d'Autriche !


Étonnement qui fut suivi de près par la plus cruelle frustration lorsque je réalisai que je n'aurais nullement le temps de demander audience à cette royale enfant, pourtant actuellement en résidence au Grand Palais. Et pourtant... ladite infante m'avait déjà scotchée une demi-heure devant le spectacle de sa grâce lors de ma précédente visite au Kunsthistorisches Museum de Vienne, et mon envie était grande de pouvoir lui adresser mon bon souvenir tout en témoignant à Diego Velázquez toute mon admiration pour l'incroyable rendu des cheveux, des tissus, des rougeurs juvéniles, des dentelles et des fils d'argent qui font de "L'infante Marguerite en bleu" un tableau envoûtant.


Grâce au "Dossier de l'art" consacré à l'exposition temporaire du Grand Palais - laquelle réussit l'exploit de réunir plus de cinquante toiles attribuées au Maître du Siècle d'Or - et à l'oeuvre de Velázquez, ma frustration s'est toutefois transformée en plaisir. Tout d'abord, est-il besoin de rappeler que le support est de très belle qualité ? Pour une revue d'art, c'est un minimum syndical. S'ajoute à cet acquis le très bon rendu des œuvres, nombreuses, qui illustrent à merveille le propos, de qualité lui aussi et servi par des spécialistes qui savent écrire sans lasser, ce qui n'est pas si commun.


Je ne peux que louer le choix thématique de la rédaction qui donne au dossier une cohérence très appréciable. Quelle satisfaction de redécouvrir Velázquez à travers son temps et la société qui fut la sienne, de comprendre l’assujettissement inhérent à son statut de peintre de la Cour et les mœurs de la noblesse la plus austère et rigide d'Europe, mais aussi d'entrevoir sa personnalité à travers son observation des plus humbles, son traitement des natures mortes, son travail tout en pudeur et en révérence des sujets religieux, son attachement à rendre fidèlement l'expressivité des regards, des lèvres ou des mains, enfin, de saisir l'étendue de son talent. Velázquez sut notamment résoudre les grands paradoxes qui accompagnaient la plupart des commandes, comme cette complexité à figurer la gloire des puissants sans tomber dans l'emphase des vaniteux, ou encore cette difficulté à placer de l'autorité et du charisme dans le regard d'un prince de cinq ans.


Ce "Dossier de l'art" met en lumière les enjeux de la rétrospective de 2015 au Grand Palais et explore avec finesse les logiques de l'artiste dans toute leur pluralité.

Gwen21
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le 24 juin 2015

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