Publié sur L'Homme qui lit :
La période de l’histoire entourant la seconde guerre mondiale est intriguante à bien des égards, et ma curiosité et mon besoin d’essayer de comprendre la survenue du pire me pousse régulièrement à lire des essais historiques, rédigés comme de véritables enquêtes. C’est sur la descendance de certains des pires nazis que s’est penchée Tania Crasnianski dans ce récit glaçant et troublant à la fois.
Leurs noms sonnent souvent comme les pires passages de notre histoire récente, celle du nazisme, des crimes de guerre, de l’abandon de l’humanité au profit de la barbarie, de la haine, d’une folie inqualifiable. Pourtant, Himmler, Mendele, Göring, Bormann, Speer et les autres furent des parents ordinaires, voire de bons parents, aimants, pour certains.
Comment ces hommes voués à la défense de l’état nazi et de la solution finale, pouvaient-ils faire exécuter des centaines d’hommes, de femmes et d’enfants dans les camps de concentration la journée, et rentrer chez eux le soir, jouer avec leurs enfants ? Quelle part de dualité existait-il dans l’esprit de ces hommes sans pitié, qui pourtant aimaient éperdument leurs enfants ?
C’est à cette étrange dichotomie que s’est intéressée Tania Crasnianski, avocate pénaliste aux origines variées, dans cet essai dédié aux enfants de nazis. Qu’est devenue la descendance de ces hommes, condamnés pour la plupart lors des procès de Nuremberg ? Certains suivront les pas de leurs parents, perpétuant une tradition extrémiste, frôlant avec le négationnisme. D’autres prendront des chemins radicalement opposés, changeront de nom, se convertiront au judaïsme, se feront stériliser pour éviter toute descendance, comme si la folie de l’homme n’était qu’une maladie transmissible. Un essai aussi complet qu’étonnant, richement documenté et passionnant à lire.