Pascal Picq est un paléoanthropologue qui enseigne au collège de France. Il travaille sur les questions propres à la nature humaine et s’est dirigé dernièrement sur l’étude critique des sociétés matriarcales et patriarcales. (Il doit s'ennuyer)
L’auteur commence par un constat : le XXI ème siècle est marqué par une sorte de guerre sordide qui persiste depuis des siècles et où les femmes sont victimes des violences commises par les hommes. Il dénonce le fait de parler et de s’intéresser aux hommes unilatéralement, la moitié non masculine étant "libérée" nous dit-il des contraintes de la nature - la reproduction et les cycles biologiques. Peut-être aurait-il mieux valu parler de gestation…
Quoi qu’il en soit, Picq cherche à déterminer quelles logiques biologiques et culturelles sont à l’oeuvre dans ce processus de pérennité du patriarcat, du moins c’est l’ambition du présent ouvrage - en particulier en mettant en avant la violence masculine. Je suis loin de partager son développement et je trouve que sa lecture, se voulant dénuée d’une vision plate et patriarcale, n’en reste pas moins vague sur ses intentions
Partie 1 - traite de la sexualité et de la coercition sexuelle chez les singes et grands singes comme clef d’interprétation
Selon lui, les humains ne se sont pas affranchis de leur processus d’évolution et nier leur nature biologique alors qu’il y a des travaux sérieux en paléoanthropologie et en éthologie ne confère pas aux sciences humaines une valeur immuable. Cela n’enlève pas les spécificités humaines en termes de culture et d’analyses sociologiques selon lui, bien au contraire. Et il semble vraiment l'avoir oublié en cours de route.
Si les mâles sont universellement violents avec les femmes selon ce paléoanthropologue, peut-on postuler que cela serait un archaïsme hérité de notre évolution, un comportement d’ordre naturel ? Pour Picq, il ne faut pas tomber dans une psychologie évolutionniste qui revêt plutôt une idéologie pseudo-scientifique qui vient renforcer des stéréotypes de genre : l’homme est fort et copule sans ménagement, la femme est fébrile et s’arrangent à copuler avec des hommes viriles. (Des représentations que l’on trouve encore partout dans l’imaginaire social) D’emblée, dès l’introduction, les violences subies par les femmes sont d’ordre culturel, il l’écrit noir sur blanc. Ça ne suffit pas de l'écrire si on essaie de justifier l'aspect biologique à travers tout l'ouvrage derrière, on n'est pas teubé.e.
Page 35 - il décrit une gravure très stéréotypée, l’homme débout, fort, fier et la femme à ses pieds, adossée à un rocher. C’est précisément ce type de gravure/peinture qu’on retrouve dans le documentaire « Lady Sapiens, à la recherche des femmes de la préhistoire" , où différentes chercheuses montrent que la représentation des femmes au XIXème est montrée comme soumise, objectivées ou mises en avant comme protectrices. Sans parler de la culture du viol qui illustre une bestialité sexuelle et sauvage dans les « temps anciens » comme si cela avait toujours été ainsi avec l’oeuvre de Paul Jamin, le rapt à l’âge de pierre de 1923.
Picq pose deux questionnements sur la violence masculine : est-ce un fait de l’évolution que les cultures n’ont pas réussi à éradiqués et ont par là même aggravé ? Ou est-ce que la préhistoire aurait été plus clémente envers les femmes comme le matriarcat ancestral voudrait en témoigner, qui relèverait alors de la culture ? Picq propose d’analyser, par un positionnement épistémologique évolutionniste, les formes de coercition des mâles envers les femelles dans les sociétés des singes et des grands singes pour savoir si ces différences conduisent obligatoirement à des violences exercées par majoritairement par un sexe sur l’autre. Toutefois, il rappelle que ce n’est pas parce qu’un comportement humain existe chez les grands singes qu’il est bon dans les sociétés humaines. (Sans blague, alors pourquoi remettre ça sur le tapis h24 et ne pas proposer une lecture sur les singes uniquement ?)
La binarité de genre basée initialement sur une binarité de sexe est d’abord liée à un avantage en terme d’évolution et de reproduction sexuée. Le sexe se définit comme une fonction biologique avec un mode de reproduction associé à la fusion de gènes pour constituer le génome d’un nouvel individu. Le sexe a pour vocation de limiter l’autofécondation, même chez les espèces de plantes ou d’animaux hermaphrodites qui éliminent les mauvais gènes, dans le but de résister à des virus qui mutent très vite. La sélection sexuelle décrit quant à elle comment les individus des deux sexes assurent leur descendance par le choix de partenaires sexuels. Il existe 3 formes de sélection sexuelle : la compétition entre les membres du même sexe (les femelles), la sélection entre les deux sexes et la coercition sexuelle, cette dernière étant une dénomination récente.
Chez les mammifères, le dimorphisme sexuel favoriserait les mâles en plus de l’asymétrie de l’investissement parental s’accompagnant fréquemment de coercition masculine. Toutefois, il existe des espèces où les femelles dominent : c’est le cas des loutres ou des castors. La dominance ici ne signifie pas coercition sexuelle... Si la coercition sexuelle est masculine, elle ne se retrouve que dans environ 10% des espèces de mammifères et les femelles ont des stratégies permettant de contrer ces formes de coercition. (Pourquoi tu t'entêtes là dedans du coup ?)
Une étude de 1975 par les chercheurs McArthur et Wilson modélise deux stratégies de reproduction dites K et r. r s’appuie sur une stratégie quantitative, des portées de petits nombreuses dont l’espèce subit de fortes variations démographiques, souvent de petits mammifères. K s’appuie sur une stratégie plus longue, souvent avec un seul petit, une longue gestation, un sevrage tardif qui demande un investissement maternel. Ces espèces auraient une tendance plus importantes en terme de coercition masculine, allant des agressions physiques aux infanticides.
Picq se demande alors si une corrélation existe entre l’asymétrie de l’investissement parental et le niveau de coercition subi par les femelles.
En analysant les chimpanzés et les bonobos, il conclut qu’il est difficile de savoir quel trait aurait pu adopter l’homme de ses cousins, et propose deux versions possibles de ce qu’il envisage comme notre dernier ancêtre commun, les premiers représentant la coercition patriarcale et la deuxième, très peu étayée car servant peu son propos, l’hypothèse d’un dernier ancêtre commun qui serait féministe.
La conclusion qu’il faut à mon sens en tirer c’est que bien qu’intéressant, cela a mon sens n’a peu d’importance sur les violences subies par les femmes dans le monde aujourd’hui, qui plus est cela peut servir de justification pseudo-scientifiques, bien que cela ne soit, nous dit Picq, pas son intention.
Partie 2 - blablabla
Homo sapiens apparait en moyenne très coercitif envers les femmes. On observe chez lui des comportements coercitifs déjà observés chez d’autres espèces, mais en plus sévères. On trouve aussi de nouvelles formes de coercition : les ablations, les meurtres, les violences autour de l’acte sexuel.
Picq propose de parcourir les caractéristiques d’Homo Sapiens :
- 9 sociétés sur 10 sont patrilocales
- les sociétés sont majoritairement monogames et/ou polygynes.
- les formes de dominance entre les femmes et les hommes sont très diverses et interviennent à la fois dans les sphères publiques/politiques et les domaines du privé et du sacré. Les sociétés patriarcales dominent même s’ils restent des sociétés matrilinéaires ou matrilocales.
- les hommes veillent à ce que les femmes soient le plus confinées possible dans la « maison »
l’investissement parental des hommes est très variable et couvre un large spectre qui va de l’abandon aux comportements de type « nouveaux pères », montrant une forte implication dans les tâches éducatives
- les sociétés sont majoritairement organisées autour de la hiérarchie de mâles plus ou moins apparentés avec une compétition intense pour le statut
Derrière l’expression « l’homme descend du singe » se cache en réalité, le DAC, le dernier ancêtre commun, reconstitué à partir des caractères partagés par ses descendants. Une découverte imminente en Éthiopie d’une de nos ancêtres communes surnommée Lucy en 1974, une femme qui reste à souligner.
Plus tard dans son analyse sur les chimpanzés et les bonobos, il conclut qu’il est difficile de savoir quel trait aurait pu adopter l’homme de ses cousins, et propose deux versions possibles de ce qu’il envisage comme notre dernier ancêtre commun, les premiers représentant la coercition patriarcale et la deuxième, très peu étayée car servant peu son propos, l’hypothèse d’un dernier ancêtre commun qui serait féministe.
La conclusion qu’il faut à mon sens en tirer c’est que bien qu’intéressant, cela a mon sens n’a peu d’importance sur les violences subies par les femmes dans le monde aujourd’hui, qui plus est cela peut servir de justification pseudo-scientifiques, bien que cela ne soit, nous dit Picq, pas son intention.
Je vais maintenant m’intéresser aux sociétés matriarcales et à la critique qu’il émet :
Goettner-Abendroth dresse un aperçu des fondements idéologiques et philosophiques de la thèse du matriarcat ancestral au XIXème siècle. La paléoanthropologie, la préhistoire, l’ethnographie sont des sciences humaines qui débutent dans l’une des périodes les plus misogynes de l’histoire de l’humanité, à la fin du XIXème siècle en Occident. Durant le révolution française, les femmes vont être invisibilisées des luttes révolutionnaires françaises. Le code civil de Napoléon datant de 1804 viendra renforcer la domination des hommes sur les femmes et leur enfermement domestique. A la seconde moitié du XIXème siècle, un autre discours, plus progressiste, émerge seulement il va préfigurer que les sociétés antérieures sont primitives et sauvages, la règle voulant qu’on aille d’un passé sombre à un présent meilleur, qui suggère que le futur ne peut être que mieux.
La première thèse cohérente d’un matriarcat ancestral est due à l’historien et philosophe allemand Johan Bachofen (1861). Il s’appuie sur les premières études des sociétés nord-amérindiennes, dont les iroquois. Les observateurs sont frappés par l’organisation matai-linéaire de ces sociétés horticoles et sur leurs règles de parenté, si différentes de celles des sociétés occidentales. Bachofen élargit sa documentation aux sociétés du Sud-Est de l’Asie, à l’Inde, à la Perse. Son approche articule les connaissances sur des sociétés actuelles et anciennes et en arrive à l’idée que les premières sociétés humaines étaient dominées par des femmes. Il invente le terme de Gynocratie. Il définit 3 âges de l’humanité : celui de la polyandrie sexuelle (une femme à plusieurs maris), puis on passerait à un deuxième âge où les sociétés seraient plus chastes et monogames, et pour finir ce qui se rapproche le plus d’aujourd’hui, l’âge de l’histoire qui se caractérise par le pouvoir des hommes et l’avènement des sociétés patriarcales avec la loi et la guerre.
Goettner-Abendoth reprend cette idée car selon elle, les sociétés patriarcales se caractérisent par l’organisation de la violence avec les lois, les institutions et les groupes sociaux qui les font appliquer (police, système carcéral, justice, armée) Au fil de son enquête ethnographique, elle fait plusieurs constats :
- Toutes les sociétés matriarcales actuelles sont agricoles.
- Elles sont matriarcales et matrilinéaires. Les statuts sociaux se transmettent de mère en fille, souvent la plus jeune. C’est l’inverse dans les sociétés patriarcales avec la transmission de la filiation au fils ainé.
- les femmes détiennent le pouvoir sacré, héritage transmis de mère à filles depuis la déesse mères des origines
- il n’y a pas de propriété privée, mais collective. Cependant, il y a souvent confusion entre les aspects communautaires, économiques et politiques sur le statut de la propriété collective
les mariages entre clans évitent la division des terres, souvent avec des mariages croisés systématiques entre deux ou trois clans
- les hommes peuvent soit s’installer dans la maison de la famille de l’épouse, soit alterner avec la résidence de leur clan
- il n’y a pas de paternité génétique mais une paternité sociale
les femmes ne pratiquent pas l’exclusivité sexuelle et il n’y a pas de jalousie - de plus l’incertitude de la parenté permettrait de diminuer les infanticides
- il n’y a pas de force de coercition sexuelle
- les femmes sont à l’origine des innovations techniques agricoles, textiles et de la conception des maisons
- les hommes représentent les intérêts de la communauté dans les relations extérieures, mandatés par l’assemblée des femmes
Remettons un peu de contexte : l’ouvrage "Les sociétés matriarcales, recherches sur les cultures autochtones à travers le monde", Goettner-Abendroth, est pionnier dans son analyse multiple. Elle étudie le matriarcat en Inde, les cultes matriarcaux au Népal, les peuples matriarcaux des montagnes en Chine, en Afrique et en Amérique du sud. Elle a également fondé l’Académie internationale hagia pour les recherches matriarcales modernes.
Pour elle, ce qu’on nomme aujourd’hui sexisme s’apparenterait à un colonialisme interne, dirigé vers l’intérieur de la société même. Elle définit l’idéologie patriarcale comme une sorte de colonialisme externe, dirigé vers l’extérieur de la société, un mélange d’impérialisme, de racisme et de sexisme fondé sur l’exploitation, qui considère les peuples autochtones comme les autres, les ignorés. En observant des sociétés dont l’asservissement ne semble pas exister de la même façon, voire pas du tout, elle met en avant un paradigme matriarcal. Ce paradigme matriarcal a été soutenu et encouragé par le mouvement des femmes contemporains et ne se cantonne pas à un essentialisme des femmes en générale et des hommes en général. A travers son ouvrage, elle souhaite donner quelques clés pour reconnaitre des sociétés matriarcales lorsque les chercheuses et chercheurs en rencontrent. Elle met en lumière que les sociétés matriarcales, loin d’être une image inversée du patriarcat, comme le prétend l’idéologie dominante dont Goettner-Abendroth fait une critique radicale, sont des sociétés d’égalité et de partage entre les sexes.
Aussi, elle ne parle pas d’un type singulier de patriarcat mais elle perçoit de multiples sociétés patriarcales : occidental de type européen ou nord américain, oriental, illustré par les cultures islamiques et chinoises ou encore méridional avec les cultures d’Inde et d’Afrique.
Elle définit les sociétés matriarcales à plusieurs niveaux :
D’abord sur le plan économique : des sociétés qui créent une économie équilibrée dans laquelle les femmes distribuent les biens, toujours en quête d’une économie de partage, présentant des points de convergence avec l’économie du don.
Sur le plan social : des sociétés fondées sur la parenté matrilinéaire, dont les caractéristiques sont la matrilinéarité et la matrilocalité.
Sur le plan politique des sociétés fondées sur le consensus. La maison clanique est le lieu des prises de décisions, présentée par un délégué masculin.
Et enfin sur le plan spirituel et culturel : des sociétés fondées sur une attitude sacrée, qui confère un monde sous le prisme du divin, en particulier la divinité féminine.
Elle s’est rendue notamment chez les Mosuo, qui sont 30 000 au Yunnan et 10 000 au Sichuan. La matriarche nommé Dabu ne se charge pas de prendre des décisions à la place de la communauté, mais elle est chargée d’arbitrer les conflits. Elle préside à l’organisation des travaux agricoles, distribue la nourriture, elle gère la propriété commune du clan, veille aux dépenses, et est la prêtresse domestique de toutes les cérémonies familiales. Les hommes, les Azhus, n’ont pas de chambre à eux: il y a des dortoirs et ils dorment avec la femme avec qui ils partagent leur vie, sinon ils se partagent une pièce. Une forme particulière du clan matriarcal peut se former lorsque les Azhus vivent durablement dans la maison clanique afin de participer à l’éducation des enfants : les enfants portent alors les deux noms des parents et la famille est dite de « coexistence ». Dans les sociétés Mosuo, 60% des familles vivent dans des clans matriarcaux qui sont pleinement matrilinéaires. Si l’on ajoute les clans en lignage de coexistence, ils sont 93%. Une minorité patrilinéaire existe développée sous l’influence du féodalisme patriarcal chinois, qui montre l’importance des sociétés extérieures. Mais contrairement à ce que critique Picq, ces sociétés ne sont pas parfaites et sont menacées à tout moment. La structure clanique Mosuo a été mise en danger par les idéologies d’inspiration occidentale qui se sont immiscées dans la société grâce à la diffusion du communisme en Chine. Les femmes âgées, gardiennes et administratrices de la famille, sont vues comme des obstacles au développement technologique de la région, comme le sont aussi le temps et l’énergie que les jeunes gens consacrent à leurs relations d’Azhu. Les hommes sont ainsi invités à grimper dans l’échelle sociale et à rompre avec leur tradition. En 1983, leur village a été ouvert au tourisme de masse masculin : cela représente la liquidation de la culture mais aussi l’humiliation des femmes Musuo qui sont dès lors considérées comme sexuellement disponibles. De plus avec la déforestation qu’il y a dans ces régions montagneuses, cultiver devient plus difficile, les vallées sont rongées par le calcaire.
Revenons au livre de Pascal Picq : celui-ci trouve cette présentation des sociétés matriarcales idylliques. On peut se demander si lire pour la première fois des récits de société sans patriarcat ne l’a pas surpris au point de penser pouvoir nier des analyses qui factuellement et empiriquement tiennent. Certes, il admet qu’avec un point de vue artistique, les représentations des femmes, de la féminité, de la maternité sont cohérentes avec ce tableau. Toutefois, il considère que c’est là peut être confondre les origines du matriarcat avec les origines de l’humanité en invoquant l’idée que les recherches effectuées reposent sur l’archéologie du Proche Orient et de l’Europe et que cela n’est pas suffisant pour avérer que cela serait scientifique…. Selon lui, les sociétés préhistoriques étaient majoritairement patrilocales, et ce présupposé des grands singes sur l’humanité semble prendre le pas... et justifier la violence en voulant dénaturer la scientificité des études de la dite philosophe des sciences.
Vis-à-vis de du point de vue de l’anthropologie évolutionniste, il émet des réserves sur la thèse de Goettner-Abendorth :
Puisque les sociétés matriarcales les plus abouties sont agricoles, il doute que l’invention de nouveaux modes de production n’aurait pas changé l’organisation sociale et se demande pourquoi ces sociétés seraient restées à la marge (à la marge sans doute à cause du patriarcat justement), alors que les sociétés patriarcales ont pris de l’ampleur. (Puis il nie la sédentarisation comme processus qui a participé à l'implantation du patriarcat aussi....)
Si les sociétés patriarcales émergent de sociétés de chasseur-collecteurs dominées par les hommes, l’invention par les femmes de l’agriculture, d’outils, de techniques et de contrôle des modes de distribution auraient dû engendré de nouvelles organisations sociales.
Et bien évidemment, si les sociétés matriarcales existent et préexistaient, comment les sociétés patriarcales sont-elles apparues ? A ce jour encore, il n'y a qu'hypothèses, cela dit elles sont MULTIPLES ET CULTURELLES.
Un point qu’il soulève me parait intéressant pour nuance l'oeuvre de Heide Goettner-Abendroth : si les sociétés matriarcales usent de la violence, dans quel cadre cela se réalise-t-il ? Coline Cardi et Geneviève Pruvost, deux sociologues ont travaillé sur la violence des femmes, un sujet encore peu envisagé dans les sciences sociales. La violence des femmes est régulièrement minimisée, invisibilisée et plus encore dépolitisée. Chez les Na, une société matrilocale de Chine, Pruvost et Cardi dénonce le caractère ambigu dans ces sociétés où malgré tout les femmes dominent et où les hommes procèdent de tâches résiduelles - certes sans violence en majorité a priori. MAIS si un homme s’enfuit, elles le poursuivent et le frappent, les Na. On peut envisager l’hypothèse que le climat globalement patriarcal et les risques d’ethnocide et d’ecocide viennent entraver le caractère empirique des études sur les sociétés matriarcales.
Pour conclure, l’oeuvre de Pascal Picq reste biaisée sur le plan structurel de son analyse étant donné qu’il a toujours vécu dans une société patriarcale, il essaie et on peut le comprendre (non) de trouver une excuses là où il ne réside que de la violence, ainsi que son point de vue situé. Pour autant, ça m'a permis d'aller un peu plus loin dans mon analyse sur certaines réflexions.