Etoile et tempête est l’œuvre majeure de Gaston Rebuffat, un récit amoureux de la montagne, exprimé au travers de la narration de l’ascension de 6 faces nord parmi les plus célèbres et les plus dangereuses des Alpes, celles du Dru, des Grandes Jorasses, de l’Eiger, du Cervin, du piz Badile et de la Cima Grande di Lavaredo.

Gaston Rebuffat n’avait pourtant pas, malgré un parcours d’alpiniste exemplaire, le profil du guide de Chamonix classique, comme nombre de ses fameux contemporains, comme Lionel Terray ou encore Louis Lachenal. Marseillais, c’est sur les parois verticales et calcaires des calanques qu’il apprend son art, et se prend à rêver de verticalités encore plus audacieuses et vertigineuses.

Rebuffat est un grand passionné de la montagne. Son exploit le plus médiatisé sera sans doute sa participation à la cordée qui a vaincu le premier sommet de plus de 8000 mètres, le célèbre Annapurna, expédition dirigée par Maurice Herzog, et aux côtés notamment de Louis Lachenal et Lionel Terray.

Mais ce ne sera pas pour autant son ascension la plus agréable. Loin des doutes, des conflits d’intérêt et de la publicité, Etoile et tempêtes n’évoque que le pur plaisir et la simplicité de la montagne, de la nature, de l’endurance, mais aussi de l’amitié et de la solidarité des compagnons de cordée.

Dans Annapurna, une affaire de cordée, David Roberts évoque comment la lecture de ce livre écrit par le grimpeur marseillais qui l’a fasciné, et plongé, lui qui était une jeune étudiant américain, dans le monde de l’alpinisme. Il décrit l’éloquence de Rebuffat dans son lyrisme de la grâce et de la souplesse du grimpeur, qui, loin du « combat » souvent décrit dans la littérature de l’alpinisme, où le sommet est véritablement « assiégé », ne fait qu’emprunter une voie presque mystique, vers des hauteurs réservées aux plus valeureux.

Il existe d’ailleurs beaucoup de photographies de Gaston Rebuffat, l’homme au pull jacquard, agile et léger comme un danseur au-dessus du vide.

C’est une véritable philosophie de la montagne, de la nature et du sport, que développe le marseillais, en amoureux des sommets sauvages.

Ces faces nord – souvent mortelles- semblent être à l’adulte ce que les arbres sont aux enfants. Un terrain de jeu ? Plus que cela, une nécessité. L’enfant ne se demande jamais pourquoi il grimpe ni ce qu’il gagne à accéder au sommet…l’enfant ne cherche pas la gloire et ne recherche pas le danger, le frisson de la mort, même si bien souvent il chute.

Existe-t-il un alpinisme sans le danger toujours planant de la mort ? La négociation perpétuelle avec ? Pour Rebuffat, cette part n’était pas capitale, même s’il s’agit d’une donnée avec laquelle on serait insensé de ne pas composer.

Nous sommes par exemple loin d’une conception comme celle développée par Reinhold Messner Nanga Parbat, Femmes au sommet, où au contraire c’est la psychologie du dépassement de soi, la transcendance du danger de mort qui façonne le visage extrême de l’alpinisme, et qui en fait une conquête de l’impossible, renouvelable tant qu’il y aura non pas des sommets encore sauvages, mais tant qu’il y aura des hommes prêt à aller au-delà des limites du supportable.

Entre ces deux visions, bien audacieux qui voudrait trancher.

La montagne a cela d’exaltant qu’elle est le spectateur indifférent de toutes ces tentatives. Elle était là avant, et le sera après.

Emma Breton
madamedub
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le 23 avr. 2013

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