Plutôt pour spécialistes motivés, une vraie réussite sur l'évolution du lien entre guerre et manœuvr
Publié en 2009 sous l'égide de la Fondation Saint-Cyr, ce recueil d'articles consacré au lien (et à l'évolution historique du lien) entre guerre et manœuvre est une vraie réussite.
Comme (presque) tout recueil d'articles, il est toutefois inégal : ceux sur la manœuvre aérienne ou la manœuvre navale n'étaient visiblement pas indispensables (à part comme "référence obligée" ?), celui de Pierre Razoux sur l'usage dans l'armée israélienne reste nettement un ton en-dessous des possibilités (comme souvent hélas avec cet auteur...), celui de Valérie Niquet sur ce concept dans la pensée stratégique chinoise reste très superficiel (et c'est bien décevant de la part de cette spécialiste). Sur la "manœuvre future" enfin, si l'article de Benoît Durieux peine à convaincre, celui de Guy Hubin est extrêmement stimulant.
Deux articles restent un peu trop en demi-teinte, laissant un regret à la lecture, mais permettant d'espérer en de prochains articles des auteurs : celui de Christian Malis ("Conceptions françaises de la manœuvre dans les années cinquante") et celui de Pierre-Joseph Givre et Hervé de Courrèges ("Dominer le terrain pour dominer l'ennemi : l'ultime défi de la manœuvre en terrains difficiles").
Les points forts du recueil sont en revanche éclatants, avec des articles de très haute qualité de la part de Jean-Jacques Langendorf ("La manœuvre allemande : l'archiduc Charles, Clausewitz, Moltke, Schlieffen"), de Corentin Brustlein ("L'apothéose de la manœuvre ? Retour sur les fondements et limites de la guerre-éclair"), de Michel Goya ("Culture militaire française et manœuvre" ainsi que "1918 : l'armée motorisée française gagne la guerre") et de Thierry Widemann ("La réhabilitation de la manœuvre au XVIIIème siècle").
Mentions spéciales à trois articles qui justifieraient quasiment à eux seuls la lecture du recueil : celui de Bruno Colson ("La place et la nature de la manœuvre dans l'art de la guerre napoléonien" - qui utilise avec talent les acquis de Camon ou de Colin - et peut-être de Béraud, pour les revisiter de manière étonnamment "moderne"), l'introduction générale de Michel Yakovleff ("Le concept de manœuvre"), et la lumineuse synthèse (parfois même teintée d'un certain humour) d'Etienne de Durand ("Maneuver Warfare, entre Vietnam et Transformation").
Ouvrage plutôt destiné aux spécialistes motivés toutefois, car supposant acquises un bon nombre de notions historiques, voire théoriques dans certains cas.