Critique de Histoire de France, à notre chère disparue par LeGrandRobert
Les poncifs de toute une époque brillamment répertoriés. L'humour d'Ourednik est ravageur, comme toujours.
le 7 avr. 2014
On pardonne sans doute plus volontiers aux inconnus qu’à ceux dont on se sent proche. Écrit par un autre, ce « roman didactique en douze chapitres » et une quarantaine de pages m’aurait peut-être agréablement surpris ; par Ourednik, il prend quelque chose d’un peu paresseux.
Histoire de France † À notre chère disparue est rédigé à la façon de ce qui pourrait être un manuel d’éducation morale de la IIIe République : un ensemble de maximes et de formules lapidaires autour du progrès, du patriotisme et de l’instruction, telles que « Les ouvriers sont moins nombreux à Paris que dans d’autres grandes villes, à Lyon, Limoges ou Clermont-Ferrand. Souvent, hélas !, hébétés par l’alcool, ils errent à travers les rues, et, parfois, battent leur femme » (p. 15) ou « la nature a beau être somptueuse, elle est parfois cruelle » (p. 37). De fait, la parodie est telle, qu’on se demande quelquefois s’il ne s’agit pas plutôt d’un centon. Mais il y a généralement – in cauda venenum ! – une mini-chute tirée d’un bon sens populaire reconstitué, qui dénonce l’artifice : « Oui, un jour les femmes pourront aller au scrutin et liront aussi vite que les hommes. Pardienne ! Les femmes ne sont pas des nègres, ni des bêtes sauvages ! » (p. 24).
Ce livre brille bien d’un sarcasme qui nourrit cette singulière variété de nihilisme déjà cultivée par Ourednik dans Europeana ou Classé sans suite. À la différence qu’ici, on sait très vite sur quel pied danser : « L’humour et la modernité : ce sont pour ainsi dire, les deux mamelles de la France » (X, p. 38).
Créée
le 5 mai 2017
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