Enfer virtuel en approche rapide

Un bon petit bijou SF.

Le demi-monde, c'est un monde virtuel mis au point par l'armée américaine afin d'entraîner ses biffins à la guerre en milieu urbain. pour se faire, une intelligence artificielle s'est vue donner carte blanche pour reproduire des répliques d'humains des "dupes", les plus réalistes possibles, et surtout dotés de libre-arbitre.

Et pour que toutes les conditions soient réunies pour optimiser leur terrain d'entraînement, les programmateurs ont eu la bonne idée d'implanter plusieurs personnalités de psychopathes susceptibles de s'emparer du pouvoir ou à tout le moins d'influencer en profondeur leur création initiale.

Pour corser le tout, les 30 millions d'habitants du demi-monde sont cantonnés dans un espace restreint, un cercle de 50 km de diamètre, divisé en cinq zones ethniques (Slaves, Méditerranéens, Anglo-Saxon, Asiatiques et Africains)

Rajoutons à cela que pour presser la génération de conflits entre les différents secteurs, les concepteurs y ont introduit une denrée rare mais indispensable à la vie des dupes : le sang ! (car en tant que créatures artificielles, ils en sont dénués)

Résultat, un terrain certes propice aux conflits, mais aussi au développement de sociétés réactionnaires et antagonistes très poussées.

Chacun des secteurs ainsi créé s'est transformé en véritable petit enfer, les zones anglo-slaves ayant fusionné en un "quatrième règne" nazi, la zone asiatiques étant devenu un matriarcat androphobe, la zone africaine un patriarcat misogyne et la zone méditerranéenne une zone de plaisirs décadent sur fond de montée du nazisme. Bref, pas le meilleurs des mondes, mais pas loin.

c'est dans ce contexte que l'héroïne, Ella, est embauchée par l'armée pour être envoyée dans le jeu afin d'y récupérer la fille du président des USA qui s'y est imprudemment retrouvée piégée.

Voilà pour cette longue présentation. ce qui fait de ce roman une réussite, c'est l'utilisation très intelligente qui est faite du média vidéo-ludique dans la construction du récit et dans la mise en scène des personnages.

Tout virtuel qu'il soit, le demi-monde n'en reste pas moins hyper réaliste pour ceux qui y sont envoyés (ils peuvent y mourir aussi bien que dans le vrai monde) et, cela va sans dire, pour les dupes qui y "vivent" déjà.

Et une bonne part de l'intérêt du roman réside là, dans ce simulacre de monde, si réel que l'on se demande s'il serait moral de débrancher l'intelligence virtuelle et d'y mettre fin. Car tout au long du roman, on mesure à quel point ce monde est finalement proche du nôtre. Car finalement, en quoi la situation de ces dupes est-elle différente de la nôtre ? Vivant dans l'ignorance de leur caractère de dupes, leur existence rejoint en tout point la nôtre.

Ils ont des sentiments, des envies, des peurs, des haines (ô combien en l'occurrence !), bref, ils sont humains.

Un roman intelligent (il fourmille littéralement de bonnes idées, de clins d'œil, etc...), intelligible, et qui apporte un regard intéressant sur l'idée de monde virtuel et de jeu en immersion. Une vraie réussite, qui se termine sur un cliffhanger insoutenable. la suite, vite !