Je ne suis pas amatrice de journal intime, il y a souvent des longueurs, une litanie de noms que je mélange, des digressions et une absence d'arc narratif (mais hé, la vie a-t-elle un arc narratif). Mais j'avais envie de lire le Journal de Mireille Havet parce qu'elle fait partie de cette génération fauchée, au côté de Vachet, Crevel, Rigaut...
Elle est morte à 33 ans de la tuberculose, épuisée par les excès des années folles. Sa vie est une trajectoire météorique : elle se fait connaître dans le Paris littéraire à seulement 15 ans, et Apollinaire la prend sous son aile. Elle a 20 ans quand elle écrit son journal personnel, racontant le Paris d'après-guerre, passant en revue les soirées du ghota et chassant la mondaine : une vie de montagnes russes, où l'amour le plus passionnel côtoie des phases de désespoir flamboyant.
En creux, on est témoin d'une vision profondément tragique de l'existence, et d'une mélancolie qu'on retrouve chez beaucoup des artistes de l'entre-deux guerres : tout le monde joue la comédie de la vie, dans une grande "guignolade", surjouant la joie de vivre et la légèreté, alors qu'ils sont les survivants d'une jeunesse décimée.