S'il est vrai que personnellement je ne porterai pas ce livre aux nues, je vais tout de même lui décerner un prix indépendant de la volonté de son auteur, le prix de l'amitié babélienne. En effet, ce livre a fait son apparition un beau jour dans ma boîte aux lettres et il était accompagné non seulement d'une dédicace de l'auteur à mon endroit alors que je n'ai jamais eu l'honneur de lui être présentée, mais aussi d'une charmante carte postale signée isabelleisapure et toute pleine de remerciements pour les petites choses que j'anime sur Babelio et qui ont pour noms "challenges de lecture". Bref, vous comprendrez aisément que j'étais très bien disposée vis-à-vis de ce "roman-surprise" et de son expéditrice. Après l'avoir gardé sous le coude quelques semaines pour le déguster comme une gourmandise qu'on se réserve dans un moment idéal de tranquillité et de solitude, je m'y suis enfin plongée.
Malheureusement, ainsi en est-il des lois de la lecture et des mystères de la littérature, chaque lecteur crée un rapport intime et individuel avec chaque oeuvre et de la même manière qu'on peut apprécier en commun un grand nombre de livres, il arrive que les avis divergent. C'est ce qui s'est passé avec "L'amour sans le faire" qui ne m'a pas du tout emballée, j'ai mis plus de trois longues semaines à venir à bout de ses 300 pages. Un rendez-vous manqué d'autant plus frustrant que Serge Joncour m'avait précédemment séduite avec "Repose-toi sur moi".
"Repose-toi sur moi" sont justement des mots qui se retrouvent dans la bouche de Franck, le personnage principal de "L'amour sans le faire", au détour d'un dialogue et je pense qu'ils résument assez bien l'enjeu de l'auteur qui par son écriture cherche à transmettre aux lecteurs un peu de sa grande humanité et de sa belle sensibilité, toutes deux très palpables dans sa narration et dans son style. Mais ce qui passe pour de la poésie pour la plupart des lecteurs - et j'en suis ravie pour eux - sonne hélas à mes oreilles comme une litanie pessimiste et plombante très terre-à-terre, et aussi éloignée que possible de l'évasion que je recherche en littérature. Les phrases sont courtes et simplistes, le vocabulaire répétitif (peut-être à dessein), l'écriture semble coincée entre pensées, soupirs et descriptions des personnages et le style globalement alourdi par des détails dont j'ai vainement cherché l'intérêt.
Mais tout cela se rencontre chez d'autres auteurs contemporains sans que je peine autant à la tâche donc il m'a fallu chercher ailleurs les raisons de cet échec. Au final je ferai porter le chapeau de mon ennui tenace au rythme de la narration ; il faut en effet attendre les deux tiers du livre (très exactement la page 201 sur 316) pour qu'il se passe enfin quelque chose qui sorte de l'introspection tristounette des deux écorchés de la vie que sont les deux personnages principaux. J'avais presque désespéré de trouver de l'action quand enfin elle est arrivée à pas feutrés pour me mener vers un dénouement au goût d'inachevé qui laisse en suspens tous les liens tissés par les personnages du roman - principaux ou secondaires - comme si l'auteur était arrivé au bout de sa cartouche d'encre.
Bref, j'aurais vraiment aimé aimer "L'amour sans le faire" mais c'est raté. Je concède tout de même à ce roman une très belle qualité, celle de "faire l'amitié" entre deux lectrices. Merci Isa !