Incontournable Novembre 2021
Bien qu'il ait une apparence qui rappelle davantage le roman mystère entre horreur et Halloween, c'est pourtant un roman du type fantastique où la magie côtoie Noël. Et quand on dit "magie", on parle de plusieurs formes, dont celle des prestidigitateurs de scène, celle d'un manoir habité d'objets magiques et de créatures qu'on n'a encore jamais vues, au cœur d'un drame familial. Une histoire qui pourrait sembler banale sur la base, mais qui au final, surprend par sa construction.
Lorsqu'ils faisaient route pour trouver le manoir de leur grand-père John, Hedi, 11 ans, et Spencer, 8 ans, ne s'attendaient pas à ce qu'un corbeau blanc guide le véhicule de leurs parents jusqu'audit bâtiment. À bien des égards, cette immense maison donne quelque peu froid dans le dos avec son air ancien et tous ces objets étranges qui s’accumulent dans la maison. Les enfants devront pourtant bien y passer les deux prochaines semaines, car leurs parents archéologues ont d'importantes fouilles à mener en Espagne. Ancien illusionniste de renom, leur grand-père est néanmoins devenu bien morose depuis ce numéro de boîte magique qui s'est tragiquement soldé par la disparition définitive de Rose, son assistante et épouse. Depuis, il semble s'adonner à une sorte de collection d'objets hétéroclites et mène une vie solitaire. Néanmoins, ce fatras d'objets est tout sauf inoffensif et ennuyeux, et comme un mystère vient rarement seul, une présence appelle les enfants à l'aide grâce à un message dans la poussière et un autre avec les magnétiques sur le réfrigérateur. Une personne qui tient à être trouvée. Aidés de leur cousine Jelly, de divers autres magiciens, morts ou vifs, de petites entités discrètes et chapardeuses, ainsi qu'un sympathique duo d'animaux empaillés, les enfants van Berr investiguent autant le lieu que leur propre histoire filiale.
Ah les bâtiments mystérieux remplis de secrets, ça je connais! Des histoires de ce genre , il y en a pleins en littérature jeunesse. Étonnamment, ce roman est réellement intéressant, même si on se doute bien que la présence est sans doute leur grand-mère disparue. Le tout est de la trouver. Les enfants se trouvent confrontés à toute sorte de mystères, on navigue entre des créatures ésotériques, d'autres enchantés et d'autres assez nouvelles telles que les petits Espionboisés. Certains décors me rappellaient la maison hanté de Disney World, avec les portrait d'êtres anthropomorphes, le fantôme pianiste et le jardin de statues. Bien montée, une histoire dans une maison mystérieuse est un vrai régal, et ici, je dirais que le duo d’écrivaines tient le pari.
J'ai aimé que la magie qui opère ici semble tenir de plusieurs sortes. On a celle des magiciens de scène, de tout genres, celle plus "enchantée" avec des objets doués de parole ou de vie, certains plus ésotériques, comme les fantômes et la "possession", d'autres carrément de l'ordre spatial comme la salle de la Pie ou celle du Kaleido. J'ai aussi reconnu en ces mains dorées de magiciens celles de l'univers de Willy Wonka, les ailes attachables vues dans la BD "Locke & Key", des clin d’œil peut-être? Bref, ça foisonne de magies!
J'ai aussi trouvé réaliste la présence et les rôles des personnages adultes, car trop souvent dans les romans de mystère on retrouve des enfants un peu trop brillants avec des adultes quasi inexistants un brin trop débiles. Ici, c'est assez crédible. Certes, les enfants mènent le gros des recherches, mais là où ils sont limités, les adultes sont de bons appuis.
Côté écriture, ça se lit très bien, c'est addictif et créatif, on se sent rapidement investis dans leurs recherches. Les personnages de Doug et Stan apporte une note humoristique et chaleureuse, là où le sinistre personnage de Personne ajoute une touche frissonnante. Aussi, il y a une forte présence de personnages objets, beaucoup sont même muets, mais ils contribuent à donner l'impression que beaucoup d'êtres sont au cœur du récit. Bon nombre sont attachants et originaux. Enfin, je remarque qu'il faudra attendre le milieu du récit avant de voir poindre un réel antagoniste, ce qui est peu commun, et ce d'autant plus qu'il n'a pas le rôle qu'on pourrait avoir tendance à lui prêter. Ça vous intrigue?
Petite remarque sur la couverture: elle est parfaitement en phase avec le récit, vous y trouverez beaucoup de références. Je sais qu'elle prête à confusion: on ne devinerait pas la saveur "Noeëllesque" à cette couverture sombre au titre en vert fluo. Comme quoi il ne faut jamais se fier aux apparences!
Également, je me suis interrogé sur la signification du nom de l'endroit. Un "hoarder" se dit "thésauriseur" en français, un mot peu employé qui fait référence à une personne qui amasse des richesses, de l'argent. Ça rejoint le côté "accumulateur" du grand-père, qui amasse précisément des "richesses", surtout vu de l'extérieur. Un nom tout à fait de convenance
Une belle petite trouvaille pour votre presque ado qui a tout lu et qui aime les histoires passe-partout de ce genre où Mystère, Fantastique et investigation se tressent ensemble. Un roman signé par deux australiennes, mais qui a été publié par une maison d'édition anglaise. Le roman, par sa fin, pourrait appeler une suite, grâce à une petite ouverture bien angoissante. À suivre?
Pour un lectorat du troisième cycle primaire, 10-12 ans.