D'abord, j'ai été plutôt ennuyé par le ton. Il m'a fallu un certain nombre de pages pour avaler et entendre cette ironie. Je crois toujours qu'elle n'a pas sa place dans un bouquin aussi incendiaire. L'ironie devrait y être utilisée avec plus de parcimonie. Cela aurait gagné en lisibilité. Ces facéties sont dérangeantes quand le propos est aussi sévère.

Ensuite, très vite, l'ouvrage s’attelle à définir la zone grise entre vie privée et vie politique, le mélange des genres sulfureux qui peut abîmer la crédibilité des journalistes ou des politiciens. Et là, ma lecture devient plus difficile encore. Moralement parlant, cela m'indispose d'avoir à fureter dans ces eaux-là. J'ai une sainte horreur de ces crapouilleuses histoires de cul ou d'amour. Je vois bien qu'ici elles sont censées avoir des répercussions sur la chose publique (pour des questions de pognon ou de pouvoir). Il n'en demeure pas moins que je me sens témoin d'histoires qui ne me regardent pas. La lecture est donc d'abord et pendant longtemps désagréable pour ces deux raisons.

Peu à peu, on sort de ces marécages, pour aller vers des histoires tout aussi nauséeuses (pour des raisons différentes), surtout qui déclenchent une envie de révolte, qui intéressent donc davantage le citoyen : argent, politique, droit, information, corruption, sont des enjeux autrement plus importants. Par conséquent, le livre devient plus intéressant. Toujours incisif, carré dans sa démarche, le propos est aussi instructif.

Comme "L'omerta française date de 1999, on peut également mesurer les progrès sur la transparence ou les reculades (notamment sous Sarkozy pour faire taire les juges). On s'amusera, si l'on peut dire, de voir citer Cahuzac en angelot du politique face à l'omerta de ses confrères. De l'eau a coulé sous les ponts et sa couleur n'est toujours pas aussi claire qu'on la rêverait. La lutte pour la citoyenneté est un combat quotidien et éternel. Tout le monde devrait essayer du moins d'être le plus clairvoyant, le plus attentif, surtout s'il veut à juste titre se plaindre si jamais on l'a floué. Cet ouvrage est un bon outil pour ce type de citoyen.

Au final, si je ne suis pas sûr que le livre soit totalement objectif (mais quel livre pourrait l'être?), il donne cependant le sentiment de vouloir tendre à une certaine forme d'objectivité, attaquant tout azimut, étant aussi exigeant avec les uns et les autres. Si bien qu'il m’apparaît difficile de montrer du doigt sa démarche, ni la façon de l'exécuter. Peut-être pourrait-on trouver bien maigres les sources affichées. Il serait bon, même si c'est esthétiquement plus lourd, de mettre systématiquement en note de bas de pages ou en fin de chapitre les sources sur lesquelles les journalistes se sont appuyées pour affirmer telle ou telle chose. Ils le font souvent mais ce n'est pas systématique. Cela devrait l'être pour être encore plus pris au sérieux.
Alligator
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le 29 oct. 2014

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