Voir le monde par les yeux d’autrui et se révéler : la dernière licorne

À la suite d’un événement dramatique, Paula prend une décision qui va changer sa vie de façon radicale, ainsi que sa vision du monde. Dans ce roman, Eva Kavian nous plonge dans l’univers du handicap, de l’hôpital psychiatrique et de la compréhension d’autrui.

La dernière licorne est un livre d’Eva Kavian, paru en 2008 aux éditions Mijade à Namur et comporte 212 pages. C’est un roman se voulant réaliste, suit la vie de la jeune Paula, en pleine crise d’adolescence et en conflit avec ses parents. Paula a également une grande sœur, Anna, à qui elle ressemble comme deux gouttes d’eau, mais qui souffre d’aphasie depuis une chute dans l’escalier durant sa petite enfance. Du coup, toute la vie de la famille tourne autour d’Anna, Paula se sentant totalement délaissée. Cependant, tout bascule le jour où pour protéger sa sœur, Paula décide de se faire interner à sa place dans un hôpital psychiatrique. Ainsi elle apprendra à se découvrir et à découvrir sa sœur d’une autre façon.

Dans ce roman, nous sommes plongée dans la campagne belge, à la rencontre d’une petite famille frappée par le drame. Nous suivons ces personnages dans cette vie après, si différente de celle dont ils avaient rêvé. Le roman est raconté du point de vue de Paula, nous mettant face à ses ressentis, ses peurs, ses attentes… Le style d’écriture se veut simple, authentique, direct. L’auteure ne cherche pas à faire de longues phrases pleines de circonvolutions. « J’étais dans les bras d’Anna. Anna a perdu l’équilibre et notre famille a basculé dans l’escalier. » Elle essaie de faire le portrait le plus juste possible des personnages qu’elle met en scène, sans glisser dans le cliché ou la facilité. Elle tente également de faire de même lors du séjour de Paula à l’hôpital, partie centrale du récit. Cependant, c’est dans les interactions entre les protagonistes que son écriture se veut la plus réaliste possible. De plus, la gravité du thème choisi (le handicap et l’internement en hôpital psychiatrique) pèse extrêmement peu sur le récit, ce sujet étant surtout abordé avec bienveillance et positivisme.

Nous avons beaucoup apprécié notre lecture et le travail fait par l’auteure sur la thématique qu’elle aborde. Les personnages sont très attachants, le handicap n’est pas dépeint comme de l’infantilisation ou de la faiblesse chez la personne qui le vit. Nous avons réfléchi avec l’héroïne, nous avons observé ses hésitations, ses doutes, ses erreurs et nous l’avons vue grandir et se révéler. Nous avons aimé cette maturité et cette remise en question, qui de notre point de vue sont une des forces principales de ce roman. Les autres étant l’écriture des personnages d’une part et les échanges entre eux d’autre part. Seul bémol à nos yeux : l’hôpital psychiatrique dépeint dans le roman apparaît par trop comme un idéal, un modèle qui malheureusement n’existe que trop peu dans la réalité, ce qui peut donc donner un point de vue biaisé sur la vie des patients dans ce genre d’établissement.

En conclusion, nous vous conseillons fortement de lire ce livre. À notre sens, il fait partie des lectures faisant grandir le lecteur et est une invitation à réfléchir sur un sujet que nous n’abordons pas toujours dans notre quotidien.