Très beau roman. L'incipit est déjà magnifique. Tout et rien ne se passe à la fois dans cette campagne pendant la PGM : la solitude d'une veuve, le patriotisme primaire d'un village, les élans de la chaire, les liens mère/fils. En adoration devant cette écriture qui plonge dans un rêve éveillé - que j'ai d'ailleurs physiquement éprouvé, en lisant ce roman d'une traite dans un long trajet de train, m'endormant de pages en pages à mesure que je m'éveillais. De Richaud raconte avec omniscience et justesse les sentiments des enfants, attachés à leur parents, ici un jeune garçon avec sa mère (versus garçon et son père dans la Fontaine des Lunatiques). Alors oui, le côté subversif du roman qui raconte les parties de jambes en l'air de cette veuve d'un haut gradé avec un soldat réfugié allemand, qui attise la haine et la xénophobie des habitants, n'a plus vraiment d'actualité (et pourtant on pourrait déplacer cette frontière aux conflits israélo-palestiniens : ces parents qui enlèvent leurs enfants d'équipe de foot car en présence de Juifs... et de manière générale la binarité des sentiments se trouve bien plus exacerbée qu'à l'époque).