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La "construction modulaire réitérée" des plantes.
"Le corps d'un arbre est composé d'unités répliquées"
Contrairement à l'individu animal, la plante ne souffre pas d'être sectionnée, c'est l'une de ses manières de se reproduire. Elle connaît une fréquente instabilité génétique : un arbre est comparable à une colonie, dont les parties sont sujettes à de fréquentes mutations.
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"elles répartissent sur la totalité de leur corps les fonctions que les animaux concentrent dans des organes spécifiques. Décentraliser est leur mot d'ordre. (...) Distribuer chaque fonction sur un espace aussi large que possible est le seul moyen de survivre à la prédation" et aux mutilations.
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"malgré l'absence de tout organe assimilable à un cerveau central, les plantes perçoivent leur environnement avec une sensibilité bien supérieure à celle des animaux ; elles rivalisent activement pour l'obtention de ressources limitées disponibles dans le sol et dans l'atmosphère ; elles procèdent à une évaluation précise des circonstances ; elles se livrent à des analyses sophistiquées des bénéfices et des coûts relatifs à toute opération ; enfin elles définissent et entreprennent des actions appropriées aux stimuli venus de leur milieu."
200 "elles sont à même de percevoir toujours (...) une multiplicité de paramètre physiques et chimiques : lumière, pesanteur, éléments minéraux à disposition, humidité, température, stimuli mécaniques, structure du sol, composition gazeuse de l'atmosphère...(...) la proximité ou l'éloignement d'autres plantes, leur identité, la présence de prédateurs, de symbiotes ou d'agents pathogènes"
21 L'olivier soumis au stress d'un sol salé ou de la sécheresse, va s'y adapter. Si ces conditions se reproduisent ultérieurement, il va effectuer les modifications anatomiques et métaboliques idoines plus rapidement.
28 Les plantes qui ont cessé de réagir à une (sensation de) chute, vont réagir à des secousses - ce n'est donc pas la fatigue qui a interrompu leur comportement.
"Plusieurs recherches, menées surtout dans le domaine de la mémoire du stress, sembleraient démontrer l'importance fondamentale, pour la formation de ce type de souvenirs, de l'épigénétique. Cette discipline a permis de décrire l'héritabilité de variations non attribuables à des modifications de la séquence ADN. En d'autres termes, il s'agit de changements qui altèrent l'expression des gènes mais non leur séquence,
par exemple la transformation des histones (des protéines ayant pour fonction principale l'organisation de l'ADN), ou encore la méthylation de ce même ADN"
30 "Chez les plantes, [les prions] constituent peut-être une modalité originale de mémoire biochimique."
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Les plantes sont capables de mouvements passifs et de mouvements actifs - "ils se fondent pour l'essentiel sur un simple transport d'eau, sous forme de liquide ou de vapeur."
158 "on appelle tropismes l'ensemble des réponses au milieu qui se manifestent sous la forme d'un mouvement. De ce point de vue, les plantes se caractérisent par une croissance directionnelle de leurs différentes parties, et en particulier de leurs racines, sous l'effet de stimuli extérieurs dont les principaux sont la lumière (phototropisme), la gravité (gravitotropisme), le contact avec un autre corps (tigmotropisme), le gradient d'humidité (hydrotropisme), l'oxygène (oxytropisme) et l'électricité (électrotropisme). Des recherches récemment effectuées au sein de mon laboratoire ont permis d'y ajouter le phonotropisme, à savoir une croissance régulée par une source sonore. La combinaison de tous ces mécanismes permet à une plante de survivre dans des milieux hostiles et de coloniser le sol à travers la création d'un système racinaire qui assure sa survie et sa stabilité, et dont la masse et la longueur (...) sont souvent bien supérieures à celles de ses frondaisons."
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"Chaque racine dispose de son centre de commandement autonome, qui l'oriente mais qui, comme dans une véritable colonie, coopère avec les autres apex racinaires à la résolution des problèmes concernant la vie d'ensemble de la plante."
202 "C'est donc la totalité de son apex racinaire qui guide une plante, comme une sorte de cerveau collectif ou mieux encore, d'intelligence distribuée sur une surface parfois immense.(...) un arbre adulte (...) en compte sans aucun doute des milliards."
206 "Et toujours sur le même modèle qu'une colonie d'insectes, le protocole de transmission de l'information d'un apex à l'autre, c'est-à-dire entre agents autonomes différents, se fonde selon toute probabilité sur la stigmergie. Ce terme désigne une caractéristique des systèmes dépourvus de contrôle centralisé, et qui adopte les changements du milieu comme instrument de communication." Fourmis laissant des traces chimiques, termites des boules de boue, humains laissant des messages sur internet.
L'auteur compare l'organisation des racines aux prises de décision collectives des abeilles. Lorsqu'une partie quitte la ruche d'origine pour former un essaim qui s'installe temporairement dans un arbre, elle envoie des éclaireurs d'où émergera une majorité en faveur d'un site de relocalisation.
Il constate que la loi du plus fort n'est pas la norme dans la nature, et que, même lorsqu'il s'agit de prises de décision humaines dans les domaines médicaux, juridiques, politiques... Le plus grand nombre de participants favorise une meilleure décision.