La Der des Der , ou World Last War dans sa version originale , est un roman de science-fiction écrit par Norman Spinrad et publié en 1986. Si il y a bien un écrivain , parmis tout ceux que j'ai lu , qui aura marqué mon année 2017...ce serait Cormac McCarthy pour son Méridien de Sang. Ou encore Robert Silverberg et son Oreille Interne. Mais , entre toutes ces lectures transfigurantes qui ponctuèrent chacune à leurs manières cette année exceptionnelle , il y a un auteur qui aiguisa ma fascination au point d'être - avec K.Dick , bien évidemment - celui que je lu le plus en cette dix septième année du second millénaire. Et cet auteur , c'est Norman Spinrad.
Dans la Der des Der , l'auteur originaire de New-York nous introduit à une sorte de futur très eighties , avec une guerre froide qui n'aurais jamais vraiment pris fin - si ce n'est pas en vérité un monde totalement alternatif que Spinrad établit. Dans ce monde ci , les tensions géopolitiques entre les blocs et les peuples sont échauffés par un émir psychotique du Moyen-Orient du nom d'Hassan al Khorami. Ce fou , leader religieux , à l'esprit enfumé par le haschisch qu'il fait inhaler à son propre peuple et son armée , est un homme qui combine deux excès : celui de l'ambition et celui de l'argent , que la nappe de pétrole sur lequel flotte son petit califat lui fourni en abondance. C'est grâce à l'argent d'ailleurs que cet homme dangereux se retrouve du jour au lendemain à la tête de tout un arsenal atomique , faisant de lui un danger pour les enjeux dans la région , et la stabilité du monde. En ce monde où le président des Etats-Unis , ancien concessionnaire automobile rendu obsédé sexuel par une secte de junkie , où le premier secrétaire de l'Union Soviétique est un cadavre , et où les missiles atomiques sont orienté par le biais de bornes d'arcades , la tension monte...
Une histoire de fou , une caricature à vif dans la chair de l'insensé. Voilà ce que j'attendais , si désespéramment de Norman Spinrad ! J'ai bien fait d'insister , d'engager ma monnaie dans ces deux vestiges de la collection Superlights que sont La Der des Der et La Derniere Croisiere du Dragon Zéphyr. Ce roman est un véritable délire décomplexé à la Tex Avery , saupoudré d'un toupet très cher à l'auteur de Jack Barron. Il ne se passe pas un instant dans le livre où l'on ne nage pas en plein absurde , entre conversation surréaliste et situation génante.
On pourrait certes voir en La Der des Der - et plus particulièrement dans le personnage de l'émir Khorami - une caricature tout à fait obscène des états musulmans du golfe. Et il est vrai que cette vision du fourbe arabe à l’ego démesuré , n'ayant pour seul et unique but pour toute son existence que de raser l'état Israël est carnavalesque au possible. Mais s'arrêter sur Khorami , ce serait éclipser tout les autres personnages , tout ces clowns macabres à qui l'on a refilé le bouton nucléaire et qui trépignent d'impatience de pouvoir s'en servir. La crise que traverse ce monde déjanté , analogue à celle du Dr.Folamour de Stanley Kubrick , est une métaphore du cauchemar dans lequel l'humanité s'enfonce depuis Hiroshima et la course à la suprématie militaire totale. Aujourd'hui encore , quand on voit les écervelés qui manient nos vies au bout de quelques détonateurs suprêmes , nous sommes presque tentés de voir en La Der des Der la prévision d'une catastrophe.
Pour l'instant , néanmoins , l'année 2017 touche à sa fin et les éclats de rire que me confia ce petit bijou burlesque sonnent la fin d'une période d'un an durant laquelle la lecture m'accompagna à chaque étapes , des instants d'illusion aux instants de désillusion en passant par les nombreuses - très nombreuses ! - phases de silence qu'il fallut meubler tant bien que mal. La Der des Der se range , sans nul doute , dans la catégorie des livres qui me marquèrent , et j’espère pouvoir reprendre tout cela l'année prochaine , avec toujours autant de livres , toujours autant de mondes , toujours autant d’expériences.
Joyeuses fêtes et bonne année 2018 à tous !