Etat des lieux de l'enseignement 2010.

Un livre que ne liront probablement que ceux qui ont participé aux manifestations contre la réforme LRU.

Pour résumer, l'Europe n'a au départ eu en terme de politique éducative qu'une conception subsidiaire : proposer des actions comme la lutte contre les discriminations qui se greffent en plus des politiques nationales. Mais depuis les années 1990 (la fin de Delors), son orientation a changé. Une nouvelle politique s'est mise en place, qui n'a rien de direct, car elle fonctionne en terme de benchmarking (étalonnage, en vue de créer une norme commune) : des outils, contestables, ont été mis en place pour évaluer les politiques nationales d'éducation, selon des conceptions néolibérales, et notamment celles du Life Long Learning (LLL) : l'école doit simplement fournir à l'élève un savoir minimal et surtout des compétences utiles aux entreprises, avec l'idée qu'il lui faudra se former tout au long de sa vie pour s'adapter à une économie sans cesse changeante. Et sans qu'il y ait contrainte dans les textes européens, comme un banc de poisson qui change de direction à l'unisson, les politiques nationales se sont alignées sur ces points.
- Le livre le développe en détail sur les universités, parmi lesquelles se détachent désormais deux groupes : les pôles d'innovation à rayonnement international, qui en Europe peinent à émerger faute de capitaux comparables à ceux des Etats-Unis, et les universités professionnalisantes, bref les provinciaux, ceux qui ont remplacé l'IUFM. Le livre rappelle que Prodi, un des initiateurs de cette tentative, avait lui-même reconnu l'impasse de cette voie, dans laquelle les politiques ont cependant perduré.
- Au niveau de l'école, cela passe par le fameux socle de compétences, dont on jurait au moment de son adoption qu'il n'avait pas vocation à se substituer aux programmes, et j'ajoute que l'on voit bien, avec l'instauration actuelle de l'EMC et des EPI, que l'on va pourtant dans ce sens.

Pour qui a suivi cette actualité, ce livre n'apprendra pas grand-chose, il se borne d'ailleurs à un récapitulatif, au langage assez orienté, mais honnête, des conflits chez les enseignants et les chercheurs de ces vingt dernières années. Il ne propose d'ailleurs pas vraiment de solutions, à part continuer à s'informer. L'exercice est donc limité, mais c'est rassurant de savoir que ce genre de contre-discours, pour si étriqués qu'ils puissent parfois paraître, en se bornant à un combat d'arrière-garde, continue à voir le jour.