Né en Algérie en 1896 et décédé a Paris en 1963, Jacques Spitz est un auteur aujourd'hui quasiment oublié. On lui doit pourtant huit romans de Science-Fiction rédigés entre 1935 et 1945, pleins de cynisme et proches du mouvement surréaliste, dont La Guerre des Mouches en 1938.
Légèrement remis à jour par la suite, principalement afin d'intégrer des références au contexte géo-politique, le roman suit Juste-Evariste Magne, un petit laborantin sans histoire étudiant les drosophiles. Il est envoyé en Asie alors qu'une invasion de mouches décime la population en transmettant diverses maladies; il découvre alors que les insectes semblent intelligents et l'invasion, planifiée. Les mouches se mettent alors à envahir le monde...
Roman assez court et à la forme plutôt classique, La Guerre des Mouches se démarque toutefois par un pessimisme rare, Jacques Spitz nous faisant assister à la destruction complète de la civilisation tout en tirant à boulet rouge et avec beaucoup d'humour noir sur les comportements humains, naviguant entre scènes horrifiques collant des frissons de dégoût et sarcasme belliqueux, jusqu'à une fin du monde totalement grotesque sous forme de guerre totale qui n'aurait pas fait tâche chez un Norman Spinrad, période Rêve de fer.
En résulte une petite horreur surréaliste, toute en grouillements de larves et épidémies, à la fois répugnante, ridicule et hilarante, n'épargnant rien ni personne.
Du grand art.
"- Il est inconcevable qu'une humanité qui se dit civilisée puisse montrer tant d’indolence, portant à son flanc cette plaie couverte d'insectes qu'est l'Equateur de la planète. Que penseriez vous d'un homme qui continuerait à plaisanter au dessus de son apéritif quand un essaim de larves lui dévore le ventre ? Qu'en penseriez-vous, mes chers auditeurs ? Et bien, cet homme, c'est vous. Les générations à venir, s'il doit y avoir pour notre espèce un avenir, ce dont je commence à douter, s'étonneront de la légèreté coupable dont l'époque présente aura fait preuve. Nous ne devons plus avoir qu'une seule préoccupation, qu'un seul mot d'ordre : Tous contre les mouches ! Mort aux diptères !"