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Le texte :


On ne ment pas avec les sentiments


Mathilde. Gaspard. Guillaume. L’une sombre dans la folie. Le deuxième vit pour la première. Le dernier s’est suicidé. La première est obnubilée par l’absence définitive du dernier, elle la ronge, elle la grignote petit à petit parce qu’elle l’interroge sur elle-même jusqu’à créer une sorte de poltergheist de Guillaume qu’elle est persuadée de voir, de sentir, au grand désarroi de Gaspard.


Cathy Galliègue décrit merveilleusement la lente descente aux enfers, c’est en tout cas comme cela que le lecteur ne peut que le voir, de Mathilde, les troubles psychologiques qui l’agitent. En prenant pour points de départ d’une part le récit de la dernière rencontre de Mathilde et de Guillaume et d’autre part, de manière plus détaillée, plus consciencieuse, la construction pierre à pierre de l’édifice, au demeurant fragile, du couple composé par Mathilde et Gaspard, Cathy Galliègue construit son récit au fur et à mesure qu’elle déconstruit Mathilde.


En donnant la parole à Mathilde, qui ne s’économise ni ne s’épargne pas elle-même, en toute honnêteté et transparence, Cathy Galliègue offre à la folie les moyens de s’exprimer comme pour décrire de l’intérieure les démons internes qui rongent Mathilde. Démons internes que Mathilde finit par personnifier en dehors d’elle : ce qui pourrait fonctionner comme thérapie n’est qu’une marche de plus descendue dans cette recherche d’absolu, dans cette quête d’amour qui vampirise totalement Mathilde.


De ce contexte particulièrement lourd, Cathy Galliègue parvient à faire une histoire vaporeuse, logée dans les limbes des sentiments et des sensations, aux confins des mondes sensoriels. Il reste, après la lecture, longtemps après, une sensation éthérée qui n’autorise aucune distanciation avec les personnages. Que l’on ressente de la sympathie ou de l’antipathie, on ne peut rester indifférent aux destinées de Mathilde, de Gaspard et de Guillaume.


A travers leurs ressemblances et leurs différences, Cathy Galliègue brosse le portrait d’êtres qui se sont cherchés, que se sont croisés mais qui ne se sont jamais trouvés, qui essaient d’apprendre à vivre avec leurs peurs, qui finissent dominés par celles-ci, qui seront emportés par elles ou qui resteront prisonniers d’elles selon leur solidité psychologique.


« La nuit, je mens » ne se lit pas par-dessus la jambe, il faut savoir se mettre en situation de lâcher-prise pour se laisser porter par l’histoire et les personnages. Sans abandon, point de salut.

Ga_Roupe
7
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le 29 juin 2017

Critique lue 122 fois

Ga Roupe

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