La quatrième de couverture de cet essai est très séduisante. On espère véritablement découvrir une nouvelle approche de l'écologie, prendre du recul sur toutes ces questions qui deviennent parfois oppressantes... Timothy Morton y annonce vouloir conceptualiser l’idée même d’une « pensée écologique » qui s’imposera bientôt à tous. Mais l’excitation se transforme vite en désillusion tant la réflexion de l’auteur n’est pas à la hauteur de son ambition.


Timothy Morton propose quelques angles d'attaques intéressants, comme celui d'intégrer la crise environnementale dans une perspective globale plutôt que locale ou encore l’idée que « la nature n’existe pas ». Sur ce dernier point, il réinterroge longuement la distinction traditionnelle entre nature et culture. Il explique que les frontières sont bien plus brouillées qu’on a l’habitude de la concevoir et que l’on a tendance à idéaliser beaucoup de choses derrière cette idée de « nature » souvent abstraite. Il embraye avec l’idée que tous les êtres vivants sont en interaction entre eux et avec leur environnement, développant l’idée d’un « maillage » qui devrait servir de trame à toute réflexion écologique. Rien de bien révolutionnaire au final, mais tout est dit de manière excentrique à grand renfort de métaphores tirées par les cheveux et de démonstrations baroques.


Et c’est bien là la grande limite de ce livre : il manque terriblement de clarté et de rigueur intellectuelle. L’auteur s’emballe et développe des concepts parfois totalement incongrus, comme celui « d’étranges étrangers » en parlant des animaux. Il s’enferre dans des explications complètement tirées par les cheveux, multiplie les digressions fantasques, ajoute des pointes d’humour ici et là… et après deux cents pages de laïus on est bien en peine de résumer ce qu’on vient de lire. Contrairement à la promesse faite dans l’introduction (et résumée dans le titre), il n’y a pas de véritable fil conducteur et les digressions font perdre toute vision d’ensemble. Timothy Morton nous parle de Blade Runner sans que l’on comprenne trop pourquoi, puis il enchaîne avec un argumentaire pour démontrer que les moines bouddhistes du Népal feraient d’excellents astronautes ou qu’il rêverait de voir des chimpanzés promener des chiens en laisse…


Pour être tout à fait honnête, on a parfois l’impression d’être pris pour un imbécile et que l’auteur enchaîne raisonnements farfelus et thèses fantaisistes en se disant que « plus c’est gros, plus ça passe ». Sauf que non, ça ne passe pas.

ZachJones
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le 23 nov. 2019

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Zachary Jones

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