Près d'un an après ma lecture du premier tome, me voici lancé dans sa suite. Un an, déjà ? Je croyais avoir du mal à m'y remettre... mais la vérité c'est que j'avais encore de solides souvenirs de la trame du premier tome. La question est de savoir pourquoi. Parce que l'histoire est assez marquante, sans doute... mais aussi parce qu'il ne s'y passe pas grand chose, en fait.
Comme je le disais dans ma critique du premier volume, Herbert aime tellement se regarder écrire qu'il n'hésite pas à balancer 200 pages de salmigondis métaphysique dans la face du lecteur. Et pas du genre toujours très cohérent, sinon, je ne m'en plaindrais pas. Mais bizarrement, très peu de lecteurs s'en plaignent. Dune a acquis un tel statut de mythe qu'il est peut-être mal venu de remarquer que si, de nos jours, un écrivain tentait de réutiliser une formule similaire, il serait moqué, conspué, taxé d'apôtre du new-age. Mais pas Herbert, non.
L'auteur nous gratifie donc encore une fois de moult remarques à vocation philosophique. Et effectivement, ça fonctionne à peu près correctement cette fois, la relative brièveté du livre aidant sans doute Herbert à ne pas partir dans du pur n'importe-quoi. Certaines réflexions vont tourner en rond, les obsessions idéelles de l'auteur dansent devant les yeux du lecteur, parfois peut-être un peu fatigué, mais l'ambiance s'installe. De la mélancolie. Il est question de la faiblesse du puissant, des liens insécables du pouvoir, de l'impossibilité de gouverner comme on l'aurait souhaité...
Ces réflexions soutiennent un complot particulièrement retors (au point où on ne peut le comprendre totalement qu'à la fin du livre), un bras de fer psychologique qui, plus encore que dans le premier tome, annihile pratiquement toute action. Le Temps semble englué, nous sommes pris dans les rets de l'inéluctabilité avec Paul Muad'Dib, l'empereur qui voit tout, y compris son manque de liberté.
La réflexion proposée porte ses fruits. J'ai joué le jeu et je me suis laissé porté par la poésie acérée d'Herbert dont les fulgurances me donnent envie de pardonner les plus balourdes redondances... L'intrigue en devient parfois nébuleuse, se gargarisant d'une fausse complexité qui empêche le roman d'être un vrai bon roman. L'auteur m'agace... mais me fascine toujours, malgré tout. Il faut dire que la pilule passe finalement assez bien avec ce Messie de Dune qui est le seul volume de la saga à ne pas pouvoir s'utiliser comme presse-papier. Vite lu mais pas vite oublié. Le monde imaginé et ses possibilités sont vraiment enthousiasmantes. Les héros sont beaucoup plus attachants dans leur faiblesse (Paul, Alia et même le ghola...) car ils apparaissent enfin un peu plus humains. J'aime bien les héros souffrants...
Je sens que je vais me faire toute la saga, aspiré comme le Kwisatz Haderach dans une vision dont je ne peux plus vraiment me détacher, sans trop savoir pourquoi. Sans doute le récit du destin d'une planète sur des millénaires est-il un voyage qu'un grand rêveur comme moi ne peut refuser.
Ma critique de Dune: http://www.senscritique.com/livre/Dune_Le_Cycle_de_Dune_tome_1/critique/4032563
Ma critique des Enfants de Dune: http://www.senscritique.com/livre/Les_Enfants_de_Dune_Le_Cycle_de_Dune_tome_3/critique/53037674
Ma critique de L'Empereur-Dieu de Dune : https://www.senscritique.com/livre/L_Empereur_Dieu_de_Dune_Le_Cycle_de_Dune_tome_4/critique/146477404