Comme dans le précédent volet (je vais faire semblant d'oublier que l'ordre de publication des aventures d'Elric est différents de l'ordre de ses aventures...), les aventures du héros commence alors qu'il est perdu on ne sait trop où, fuyant on ne sait quel danger. Ce n'est même pas une introduction in media res, c'est une façon d'insister que l'origine ou la destination importent peu, c'est le voyage qui compte. Et encore, Moorcock ne nous offre pas le moindre dépaysement - ce qui compte c'est de voir comment Elric vit ce voyage/
Elric est paumé, on l'attend pour une mission, on peut démarrer, ça suffit. S'enchaînent ensuite trois chapitres, trois aventures.
Dans la première, on touche du doigt le multivers du Cycle du Champion Éternel, et il faut l'avouer, on n'y comprend pas grand chose. Des antagonistes bizarres, des protagonistes peu détaillés même pour ceux qui auront droit à leur propre œuvre, il n'y pas grand chose à se mettre sur la dent, le voile de l'univers qui est levé devant nous ne concerne pas vraiment celui d'Elric, mais quelque chose de bien plus grand que lui. On continue à brouiller les pistes autour de la recherche de la légendaire Tanelorn, c'est bien peu. On est paumé, et Elric avec nous - et c'est ça qui est l'intérêt majeur du roman ; parmi ces autres héros qui gravitent autour de lui, le nôtre discutera, réfléchira à sa condition et finalement, comme toujours, par pragmatisme ou par défaitisme, suivra le groupe. Défaitiste ? Fatalisme, certainement. Toujours est-il qu'en sortant de cette nouvelle on en connait un peu plus sur Elric - et on le comprend toujours aussi peu, ou par morceaux.
Ensuite, une histoire (peut-être) un peu plus faible, qui tente peut-être de nous montrer que le monde d'Elric n'est pas statique, entre passé et présent. Celle-ci est moins convaincante, probablement parce qu'ayant peu de protagonistes à sa hauteur, on suit moins les cheminements intellectuels/moraux du héros. La lecture n'en reste pas moins agréable !
Et pour finir, le gros morceau, peut-être. Si le premier chapitre ouvrait sur le multivers mais nous donnait peu de choses sur Elric, qui n'en était le héros que parce qu'il en était presque le narrateur, ici ou ouvre sur ce qui sera la grande bataille des temps d'Elric. On plonge dans un lointain passé, à la recherche des origines des Melnibonéens, d'un pacte ancestral ; surtout, ses compagnons lui permettent de briller.
Comme souvent, c'est dans ses interactions avec les autres qu'Elric prouve qu'il est vraiment hors norme - dont la moralité alterne entre l'humain et l'inhumain. Et c'est exactement dans ce héros exceptionnel que réside tout l'intérêt de ces romans.