Cela aurait aussi pu s'appeler ou comment le secteur financier gagne à tous les coups (croissance ou récession) et les autres perdent souvent. Les bonus dits "de résultats" sont en réalité systématiquement versés aux banquiers des grandes banques d'affaire type Goldman Sachs quel que soit le contexte économique.
Il est nécessaire pour comprendre ce qu'il nous raconte de connaître quelques rudiments de mathématique notamment d'indicateurs statistiques comme la médiane. Cela reste un livre de vulgarisation, les notes de bas de page sont utiles pour ceux qui veulent aller plus loin et trouver les références. Les idées générales du livre restent accessibles à un grand nombre de personnes.
Dans la préface, on comprend tout de suite à qui on a affaire, je cite : "Ma spécialité à Amherst College était la physique.[...] Mais mon cœur était ailleurs, dans les bouleversements économiques et sociaux de l'époque".
Plus loin toujours page 26 :"J'ai compris que l'économie ne se résumait pas à l'étude de l'argent, c'était une forme d'enquête qui pouvait porter sur les causes fondamentales de l'injustice, et je pourrais lui consacrer efficacement mon goût des théories mathématiques."
Pour l'auteur, l'histoire économique récente est une suite de bulles : la bulle Internet aux début des 00's puis la bulle immobilière avec la crise des subprimes. Le principe d'une bulle est que la valeur d'une start-up ou d'une maison dans ces cas est surévaluée.
Par ce livre Stiglitz entend démontrer que l'inégalité est organisée et voulue par ce qu'il appelle le 1 % (les 1% les plus riches). Il explique comment le 1% s'y prend pour effectuer le ruissellement vers le haut, le 1% prélève peu d'argent aux pauvres mais les pauvres sont nombreux donc cela fait de grosses sommes au final. Par exemple, les banques américaines font payer des frais bancaires importants en fournissant plusieurs cartes de crédits à leurs clients. Un autre point de focalisation est la toute puissance des marchés qui dictent les politiques économiques à l'aide des institution comme les banques centrales, le FMI, la Federal reserve.
La bataille a lieu sur plusieurs terrains : les idées, la justice, l’environnement.
Stiglitz montre comment le 1% fait pour faire croire aux américains que ce qui est bon pour le 1% l'est aussi pour eux.
La justice est soit trop indulgente avec les banques qui expulsent les gens de leurs foyers (totalement contre-productif car la valeur des maisons aux alentours chute également) soit trop lente ce qui favorise ceux qui peuvent attendre i.e les plus riches.
L'environnement, les compagnies pétrolières, de charbon exploitent les ressources des États-Unis mais ne sont pas prêtes à assumer les conséquences de catastrophes naturelles engendrées comme l'accident sur la plate-forme pétrolière dans le Golfe du Mexique. C'est une subvention déguisée en réalité qui est faite aux entreprises.
Il existe deux grandes manières de faire fortune :
- l'innovation
- prendre de l'argent aux autres ce qu'il appelle "la recherche de rente", c'est à dire profiter de sa situation de monopole, de ses capacités financières pour faire voter des lois qui arrangent les entreprises.
Plusieurs statistiques m'ont frappé au cours de ma lecture :
Les États-Unis dépensent autant pour leurs dépenses militaires que le reste du monde réuni.
Le 1% concentre 20% des revenus annuels du pays.
Le plus haut salaire vaut 243 fois le salaire le plus bas aux États-Unis.
Il y a 4 candidats pour 1 poste aux États-Unis.
Plus de 8 millions de foyers américains ont été expulsés depuis le début de la Grande récession
Un certain nombre de mythes comme le rêve américain sont aussi scrutés : le rêve américain est de moins en moins accessible. Autrement dit, il est rare de faire fortune avec peu de moyens au départ. L'éducation qui permet de s'élever socialement aux Etats-Unis est tellement onéreuse et parfois de mauvaise qualité ce qui conduit à l'endettement des étudiants (24 000 euros en moyenne). L'auteur est de ce point de vue là très clair, l'économie ne doit pas s'intéresser à quelques belles histoires mais observer les populations de manière plus globale.
Ce livre malgré une volonté de vulgarisation, reste un peu ardu pour les novices en économie dont je fais partie. J'ai lu deux fois la première moitié à six mois d'intervalle. Il offre un éclairage important sur beaucoup de problèmes de notre époque : l'inégalité des chances, environnement, les bulles économiques, la situation de la Grèce, de l'Espagne et les nombreux abus du secteur financier. Il est parfois révoltant mais il donne aussi de l'espoir avec des solutions alternatives aux politiques d'austérité que subissent des pays comme la Grèce ou l'Espagne. Une politique de relance par l'Etat bien faite permettrait une demande plus forte et n'augmenterait pas d'avantage au final les déficits publics.
La principale qualité de l'ouvrage est de démonter un certain nombre d'idées pré-conçues et souvent inefficaces présentes massivement dans les médias.
Il me reste encore 1 chapitre à lire donc cette critique sera mise à jour !
Si certains peuvent corriger certaines fautes ou erreurs dans les statistiques, ce sera génial.