Ce récit est avant tout celui d’une mère. Une mère qui a mis au monde un enfant, l’a chéri, soigné, aimé et ne le reconnait pas dans ce meneur d’hommes - ces égarés comme elle les appelle - qu’il est devenu ; adulé par certains, craint par d’autres. Elle ne voit en lui que son enfant, doux, peureux, respectueux et ne comprend pas le rôle qu’on lui attribue, qu’on veut lui faire jouer.


Quand le récit commence - un long monologue où elle confie ses sentiments, ses impressions –Marie a la visite de deux hommes qu’elle appellera « mes visiteurs ». On comprend que son fils est mort quelques mois auparavant. Que veulent ces deux hommes qui tentent de lui arracher ses souvenirs, le moindre mot, le moindre détail qu’elle aurait retenu ? En colère, Marie refuse de se plier à ce qu’ils semblent attendre. Elle racontera les choses dans toute leur atrocité. Voir mourir son enfant est une douleur indicible pour une mère. Elle n’a rien d’autre à dire que les faits bruts. Et dans un long cri d’amour elle nous parle de maternité, de famille, d’exil, d’Eglise et du supplice de son fils, son petit.


Après, entre autres, Dan Brown, Sarramago, Schmitt, Mélanie Chappuis... Colm Toibin prête une voix à Marie, mère du Christ, elle qui n’intervient qu’une fois dans les Evangiles, lors des Noces de Cana. Il tente de percer le silence d’une mère, d’approcher son humanité derrière la figure sacrée. Loin de l’image de la Mater dolorosa, des pietà, l’auteur nous montre une mère brisée par un fils qu’elle n’a pas compris, qui a laissé se bâtir une légende autour de lui et a pris des risques au nom d’une ère nouvelle dont elle ne voit pas la nécessité. Un fils qu’elle ne nomme plus d’ailleurs.


Sans doute ce roman choquera-t-il certains mais personnellement, je l’ai trouvé criant de vérité en ce qui concerne les sentiments d’une mère, une femme simple, qui voit son fils prendre des risques qui lui semblent insensés. Déchirée par une foule de sentiments, broyée par un destin qui la dépasse, cette Marie de chair et de sang m’a beaucoup touchée.


Je vous conseille vivement de découvrir ce livre et de vous faire votre propre avis.

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le 14 oct. 2015

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