Feu intérieur
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le 25 nov. 2021
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Un classique de la dystopie, disait la quatrième de couverture. Et moi, je dis : bien vu, Jean-Pierre Andrevon. Ce roman, paru en 1983, est censé se dérouler au 21ième siècle. Et si l'action, au vu des technologies qui sont évoquées et décrites dans ce bouquin, est, je crois, plutôt située durant la seconde moitié de notre siècle, force est de constater qu'en termes de trajectoire, en 2020, nous ne sommes pas bien éloignés de celle qui nous mène tout droit au monde (et à la France) décrite dans "Le travail du furet".
Voyez plutôt : pollution et extinction de la plupart des espèces et généralisation des technologies de paiement, de diffusion de l'information et de surveillance des citoyens. Inégalités sociales accentuées et ségrégation spatiale des différentes classes. Gouvernement technocratique, sans réelle opposition politique. Discours d'état aseptisés, positifs et massivement relayés par les médias cachant une réalité toute autre. Bouffe de merde et poisons divers généreusement répandus dans l'eau, sur la terre et dans l'air. Individualisme forcené conduisant à une extrême solitude. Et pour finir, une population résignée et acceptant finalement l'innommable sans véritablement sourciller. Un bouquin qui est avant tout politique (du moins, que j'ai lu comme tel) et dont la force évocatrice, plus de trente cinq ans après qu'il ait été écrit, reste parfaitement intacte. Ce qui est surprenant, et surtout inquiétant. Un bouquin qui parlera à tous ceux qui pensent qu'un auteur de science-fiction a pour vocation, entre autres, d'imaginer notre avenir...
Bien sûr, nous n'en sommes pas encore aux tueurs à gages fonctionnarisés et agissant pour réguler la population dans le cadre d'une politique eugéniste. Et d'ailleurs, le tueur à gages n'est probablement pas le moyen le plus rationnel d'y parvenir. On pourrait à n'en pas douter obtenir des résultats identiques en taillant, par exemple, dans les budgets de santé. Mais bon, Andrevon a aussi conçu son bouquin comme une sorte d'hommage au roman noir de la seconde moitié du 20ième siècle, roman noir dont il adopte le rythme, le style d'écriture, les archétypes scénaristiques et les personnages. D'où, bien entendu, le tueur à gages, narrateur, et accessoirement quelques autres personnages secondaires, dont le politicien pourri et la prostituée au grand coeur. Mais en nombre limité : beaucoup d'anonymes aussi en fait, solitude oblige.
Du coup, ça se lit un peu à deux niveaux : polar et dystopie. Il y a évidemment pas mal d'action, et qui va crescendo au fur et à mesure que l'on se rapproche de la fin, avec une scène de poursuite d'anthologie. C'est donc garanti sans ennui. Une petite réserve tout de même, pour finir : notre tueur à gages narrateur est également fan de cinéma des années 50~60 et nous décrit par le menu son avis sur les films qu'il visionne entre deux journées de boulot, au point que ça vire parfois un peu à "La dernière séance". Un peu superflu, à mon sens, l'hommage au roman noir est suffisamment explicite et prononcé, ce n'était pas la peine d'en remettre une couche, ça alourdit finalement un peu le truc.
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le 26 juin 2019
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