Je n'ai hélas pas retenu grand-chose de ce polar. Le point de départ est que le chef d'une brigade spéciale anti-corruption, Hua Ting, est retrouvé mort dans un club aux côtés d'une prostituée, alors que ça ne lui ressemble pas. Des huiles du parti, qui veulent faire le ménage, notamment contre Xing Xing, affairiste chef de pègre qui a fui aux Etats-Unis et continue à tirer les ficelles depuis là-bas, décident de mettre l'inspecteur principal Chen Cao sur le coup. Celui-ci travaille en tandem avec son ami le policier Yu. En théorie, c'est simple, car Chen a reçu une lettre du Parti lui donnant tout pouvoir. Dans les faits, il ne faut pas effrayer le poisson, et les cercles de Xing savent exprimer des menaces directes, par exemple sur la vieille mère de Chen. Par ailleurs une ancienne connaissance de Chen trouve la mort quand il la contacte, car elle en savait trop.


Si Encres de Chine se situait encore dans les années Deng Xiaoping, Le très corruptible mandarin se situe dans les années 2000. On retrouve des réflexions sur le changement de vie qu'a constitué l'ouverture de la Chine au capitalisme mondialisé, mais l'enquête a un rythme franchement étrange. En effet, au tiers du livre, Chen est envoyé aux Etats-Unis pour présider une délégation d'auteurs chinois participant à une rencontre avec des auteurs anglo-saxons. Jusqu'au bout, on ne sait pas bien si cet événement est fait pour l'éloigner de l'affaire, ou si c'est une stratégie.


Toujours est-il que le dénouement est sacrément raté. Je peux comprendre qu'il y ait une volonté de réalisme en montrant la frustration de Chen car son enquête est quelque peu étouffée par le parti, mais on n'a même pas vraiment de résolution quant à ce qui va arriver aux "rats rouges" (le titre original est Red rats, et désigne ces hommes louches qui ont bâti des fortunes colossales grâce à la corruption du parti).


Ce n'est pas, cependant, le principal reproche que je pourrais faire au livre. J'y ai retrouvé deux éléments originaux qui étaient déjà présents dans Encres de chine : d'abord un goût compulsif pour la description des menus que les personnages prennent au restaurant, mais surtout un caractère beaucoup trop introspectif et littéraire de l'inspecteur Chen. Celui-ci est un lettré, et la moindre péripétie, le moindre fait mineur surgissant dans l'enquête suscite en lui une réflexion littéraire et l'irrépressible envie de chercher une citation d'un auteur de la littérature chinoise ancienne qui correspondrait à son état d'esprit du moment. Je veux bien que la deuxième partie du roman se passe dans des cercles lettrés, mais cela ralentit tellement le rythme que l'on n'est pas loin de la caricature.


Peut-être est-ce moi, horrible lecteur occidental, qui n'ait pas fait l'effort de me plonger dans la poésie dégagée par chaque citation. Peut-être aussi l'éditeur a-t-il un peu forcé en cherchant à adapter tous les ouvrages de sa poule aux oeufs d'or. Ce roman-ci n'est pas majeur.


Je reste donc sur ma faim avec ce petit polar chinois qui ne tient pas vraiment ses promesses.

zardoz6704
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le 6 août 2019

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zardoz6704

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