Au japon on peut mesurer les dimensions d’une pièce en fonction du nombre de tatamis qu’elle peut contenir. Pour Otsuki, jeune quarantenaire, il s’agit d’une pièce de six tatamis dans une masure délabré d’un quartier de Tokyo. Ancien toxicomane, il végète et ne survit uniquement grâce aux femmes comme Hiroko qui l’entretiennent. Au hasard de ses déambulations dans les quartiers interlopes de la ville, il va suivre Sugimoto chez son maître Kôyama. Il assiste à la projection d’un film étrange entre pornographie et entomologie. Otsuki est troublé par la jeune actrice, d’autant plus qu’il apprend qu’elle est la petite fille du vieillard. Celui-ci lui demande de poursuivre son œuvre. A partir de là, la vie d’Otsuki va être bouleversée et transformée comme dans un mauvais rêve. Peur, hallucination, obsession, délire, rien ne lui sera épargné. Nous entrons dans une autre dimension fantasmagorique, plutôt effrayante. L’histoire se fait de plus en plus noire, les rencontres avec d’autres personnages apportent leur lot de violence et l’écriture de l’auteur devient nébuleuse. Les questionnements ne trouvent pas de réponse, les événements s’enchainent irrémédiablement et on sombre avec Otsuki dans un récit particulièrement noir et dérangeant. Un style singulier tantôt poétique, tantôt métaphysique avec des visions tirées d’on ne sait où forment un récit surprenant qui ne laisse pas indifférent et vient se rappeler à nous longtemps après la lecture. Le thème de l’identité est fort mais aussi celui de l’art de la calligraphie avec son esthétique du graphe allié à l’esthétique du corps. Cet enseignement réservé aux initiés porte en lui tout le côté ésotérique du roman. Une expérimentation à vivre au travers des lignes traduites avec justesse d’un monde si éloigné de notre occident qu’il en devient attrayant. Juste un point pour souligner la merveilleuse couverture qui n’est pas sans faire penser à Tomoe. Bonne lecture.
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