Un vrai coup de poing
Une course-poursuite haletante Le point de départ de cette histoire est l’enlèvement de Garett, fils de Pasteur et plutôt craintif, par Abigaïl Stenson, une hors-la-loi dure à cuire qui vient de...
le 29 oct. 2020
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Un quatuor de bleus
L’auteur nous présente un personnage principal qui sort de l’ordinaire ainsi que des compagnons de route improbables pour résoudre cette enquête.
Engagés plus par la nécessité que par réelle envie de combattre le crime, le joueur de poker Neil Galore, le vacher Angus Dulles, la danseuse de saloon Elly Aymes et l’indien Armando Demayo se retrouvent à faire équipe pour arrêter un voleur qui sévit sur un train et a déjà tué 3 Pinkerton.
Après s’être bien détestés, les voilà partis sur le Transcontinental pour résoudre l’affaire. Et on ne peut pas dire qu’ils sont très doués.
Neil, notre héros, mise plutôt sur sa jolie gueule et son habileté au poker au début de cette histoire pour se sortir des pires situations. Son engagement de Détective, motivé par la volonté de rembourser ses dettes, va lui permettre de trouver sa vocation même s’il a du mal à respecter le code d’honneur des Pinkerton vis à vis du jeu. Il dispose d’un talent caché, hérité de sa Nouvelle Orléans natale, qui lui permettra de mieux connaître ses équipiers. Il reste le plus futé de la bande et va en devenir le leader malgré lui. Sa rencontre avec le personnage de Weyland va lui ouvrir les yeux sur l’Agence et sur leur mission réelle.
Elly ne prend pas son boulot de détective très au sérieux. C’est une ancienne danseuse qui n’a pas rencontré le succès. Elle rêve de devenir la vedette d’un vrai spectacle sans pour autant jouer les filles de joie. On connaît peu son passé mais on sent qu’il n’a pas dû être facile. Dotée d’un sale caractère, elle mise sur ses charmes et son habileté au tir pour résoudre l’enquête et va s’avérer plus futée que prévue. Elle envisage son engagement pour l’Agence comme un tremplin pour réaliser son rêve.
Armando est un indien rescapé d’un massacre, qui a grandi dans un orphelinat blanc. Il refuse qu’on le voit comme un indien car il n’a aucun souvenir de ses origines. Il est souvent victime de racisme à cause de sa couleur de peau et doit se battre pour trouver sa place. Il se conduira comme un jeune coq jaloux pendant toute l’enquête, essayant en vain de s’attirer les faveurs d’Elly plutôt que de participer à l’enquête. Son engagement de Pink’s est un vrai choix qui lui permet de s’éviter un destin dicté par les blancs et sa couleur de peau.
Quant à Angus, malgré son air béat qui contraste avec sa carrure d’ours, il cache plus d’un tour dans sa manche. Il va passer outre dès le départ les règles édictées par l’Agence, s’attirant les foudres de Neil. Il montrera un côté malsain malgré son apparente simplicité dans la suite de leur aventure.
Aucun n’a la rigueur ni les méthodes d’investigations légendaires des Pinkerton et pourtant leur réunion improbable fera merveille et les emmènera malgré eux ,beaucoup plus loin que cette enquête. Et quelle enquête !
Une enquête aux ressorts fantastiques
S’appuyant sur l’Histoire de la construction des chemins de fer de l’Ouest, Michel Honaker nous invite à nous interroger sur ce qui fait la grandeur des Etats-Unis. Souvent représentée comme Terre de progrès, on oublie vite qu’elle s’est construite dans la sueur et le sang.
En effet, au cours de leur enquête, la fine équipe va rencontrer des indiens chassés de leurs terres par le fameux chemin de fer, des chinois venus travailler pour la compagnie ferroviaire dans des conditions épouvantables afin de terminer la pose des rails ralliant l’Est à l’Ouest et des responsables peu scrupuleux, faisant passer le profit par-dessus l’humain.
Aucun détail ne nous est épargné, malgré le classement de ce roman en jeunesse, sans doute par volonté d’ouvrir les yeux sur une réalité méconnue.
L’histoire va prendre une tournure inattendue quand Neil va rencontrer les membres de la Brigade Pâle, sorte d’agence opposée aux Pinkerton, mais sous la forme de cowboys infatigables …car déjà morts !
Face à ces morts-vivants, la fine équipe pourra compter sur le secours du vieux Weyland, trappeur rencontré en chemin qui leur indiquera les forces et faiblesses de leurs ennemis. Et ce ne sera pas de trop ! Car de zombies, on passera aux fantômes ou encore à des projections de soi plus ou moins sympas, revenues hanter certains endroits.
L’auteur sait doser les éléments effrayants et le fantastiques pour pimenter l’intrigue mais nous n’irons pas jusqu’à nous cacher sous la couette pour éviter de faire des cauchemars.
Les derniers rebondissements sur l’identité du voleur seront totalement inattendus et peut-être tirés par les cheveux, mais il introduiront une dose de mysticisme indienne pas déplaisante.
Derrière l’histoire, l’Histoire
Michel Honaker s’est documenté très sérieusement pour écrire sa série de romans sur l’Agence Pinkerton. Même s’il se permet certaines fantaisies avec l’introduction de pratiques occultes, l’essentiel de l’Histoire et du code de conduite de ces Détectives hors du commun sont parfaitement énoncées dès le début de l’intrigue.
J’ai effectué quelques recherches en anglais avant d’écrire cette chronique pour vérifier. Entre l’Histoire de l’Agence et de son fondateur Allan Pinkerton, ainsi que le code régissant leur organisation datant de 1867, presque tout y est.
Allan Pinkerton a été policier à Chicago avant de créer son agence de détectives. Il acquiert de la crédibilité lorsque l’Agence déjoue une tentative de complot visant le Président Abraham Lincoln et que ses agents jouent les espions pour les Nordistes pendant la Guerre de Sécession. Des arrestations de criminels célèbres comme Jesse James ou les frères Dalton, ainsi que le rôle prépondérant des Détectives dans l’arrêt des grèves d’ouvriers à la fin du XIXème siècle ajouteront au prestige et au sérieux de l’Agence.
Concernant leur code de conduite imposé par l’Agence, et énoncés en début de roman, les détectives devaient être irréprochables : la boisson, le jeu, le langage grossier n’étaient pas tolérés. Ils devaient garder leurs factures de dépenses lors des missions pour se les faire rembourser et s’ils rencontraient un autre agent dans la rue, ils devaient faire semblant de ne pas le connaître afin de rester discrets sur leur mission. Surtout, ils étaient dévoués corps et âme à leur boulot. La devise « We never sleep » prend alors tout son sens.
Si ce code était aussi rigoureux, c’est que le Far West ne comportait pas de police à l’époque. Il y avait bien des shérifs, mais ils œuvraient sur une ville. Les détectives étaient des agents du gouvernement et opéraient partout. Ils représentaient l’ordre et se voulaient un modèle pour les autres citoyens à une époque où il était justement difficile de faire régner cet ordre face à des criminels sans scrupules.
Dans cet opus, l’auteur introduit le personnage de Calder Weyland qui apporte un autre éclairage sur les Pink’s. Il critique le dévouement des agents envers leur patron au détriment de leur vie de famille ainsi que les méthodes douteuses qu’ils pouvaient utiliser pour parvenir à leurs fins. Weyland est un ancien Pinkerton, ce qui ajoute du crédit à ses propos. Et il n’a pas tout à fait tort.
Dans cette intrigue, on sent que les jeunes recrues sont manipulées dès le départ par l’Agence, sans grandes chances de réussite de mener à bien leur mission. Un peu comme des moutons menés à l’abattoir pour détourner l’attention.
Du point de vue historique, si les Pinkerton ont arrêté les grèves ouvrières, cela ne s’est pas déroulé sans heurts. Pour preuve, le massacre de HayMarket Square à Chicago en 1886 où des ouvriers perdent la vie après que les Pink’s aient infiltré les grévistes pour déclencher un affrontement avec les forces de l’ordre. L’Agence est alors au service du Patronat et plus vraiment du Gouvernement américain, mais les méthodes restent les mêmes. On peut pas dire qu’ils faisaient dans la dentelle.
Si l’Histoire de l’Agence de détectives la plus célèbre au monde vous intéresse, et que vous comprenez l’anglais, je vous invite à consulter leur site internet, rubrique History. Car oui, les Pinkerton existent toujours de nos jours, mais agissent désormais comme une société de sécurité privée. Ils ont été rachetés par le groupe suédois SECURITAS AB en 1999 !
En conclusion : Un premier opus d’une série prometteuse autour de l’Agence qui ne dort jamais avec un personnage principal un peu canaille, confronté à des forces surnaturelles qui le dépassent. Michel Honaker nous livre ici une parfaite uchronie sur les Pinkerton et un Far West gangréné par la criminalité. Hâte de lire la suite !
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le 29 oct. 2020
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