Le rêveur illimité , ou The Unlimited Dream Company dans sa version originale , est un roman de science-fiction écrit par J.G Ballard et publié en 1979. Ecrivain britannique , James Graham Ballard est connu du monde cinéphilique comme étant l'écrivain se tenant derrière des œuvres aussi baroques que Empire du Soleil (adapté par Steven Spielberg en 1987 ) , Crash ! ( adapté par David Cronnenberg en 1996 ) ou encore High Rise - qui n'est donc pas , comme j'ai pu l'écrire dans une précédente critique , l'oeuvre de Robert Silverberg qui a quant à lui écrit Les Monades Urbaines et dont je tiens à rectifier ici le droit légitime d'appartenance - follement adapté au cinéma en 2015 par Ben Wheatley et dont je recommande à tous le visionnage. Car , si il y a bien quelque chose que le cinéaste britannique a saisit dans l'oeuvre littéraire de son compatriote , c'est son aspect surréaliste. Dire d'un écrivain de science-fiction qu'il est surréaliste est sans doute superflu , mais je crains que peu d'autres auteurs atteignent la cheville de Ballard dans ce domaine , plus proche de types tel qu'André Breton que d'Isaac Asimov , si vous voyez où je veux en venir.
Dans le rêveur illimité , le lecteur est par exemple introduit au personnage de James Blake , gaillard un tantinet marginal , hyperactif et rêveur. Son but ces temps ci ? Voler. Voler pour de vrai. Voilà pourquoi il dérobe un Cessna à l'aéroport de Londres , ayant dans l'espoir d'accomplir le premier "vol à propulsion humaine" de tout les temps" . Malheureusement , son objectif échoue et le Cessna s'écrase lamentablement dans la Tamise , à Shepperton , en banlieue de Londres. A cet instant , Blake va accomplir l'impensable : après avoir passé plus d'une dizaine de minutes en profondeur , il va réussir à s'extraire de l'eau et à ramper sur la berge où un groupe d’indigènes viendront le secourir. Des lors , une question récalcitrante viendra perturber l'esprit de Blake , relative à sa prétendue survie. De plus , le monde autour de lui semble muter sous son influence passionné. Ne serait il pas...Dieu ?
Alors , la folie : ok. J'accepte la folie. J'accepte l'abstrait , le grand foutoir. J'en suis même friand tant c'est dans des situations tel que celles là que l'on constate la maîtrise d'un auteur sur son monde , ou au contraire d'un monde sur son auteur. Je suis devenu , depuis quelques temps , un lecteur assidu des écris de K.Dick , dont la trilogie Divine qui est - nous ne nous dissimulerons rien - un jolie tressautement en matière de détricote-ment de la réalité. De surcroît , on prétend que Ballard a écrit Le rêveur illimité en référence au Ubik de ce bon vieux Phil et il est vrai qu'en lisant la proposition dramatique , on serait presque prêt à croire en une repompe.
C'est ce que j'ai cru...Je me suis gouré. Le rêveur illimité , c'est la caricature bizarre d'une obsession science-fictionelle récurrente , que l'on retrouve aussi bien chez Ursula le Guin ( L'autre côté du rêve) que chez K.Dick donc ( L'oeil dans le ciel). Et tout cet aspect satirique me dérange , peut-être en tant que conservateur et homme d'un seul livre à la Saint Thomas d'Aquin.
Mais ce qui me dérange véritablement , c'est la banalisation de l'abstraction. Lire une scène de cul chez Vian ( J'irais cracher sur vos tombes) , ça choque , on en parle mais on se rend compte qu'elle est essentiel à un bonne compréhension du ou des personnages ; lire une scène de viol chez Teulé ou McCarthy ( Je , François Villon et Méridien de Sang ) c'est concevoir toute l'insupportable violence de mondes qui le sont tout autant , et ça bouleverse - certes - sans pour autant dissuader la lecture , la renforçant bien au contraire en un incroyable effet de fascination sociopathique ; lire les pulsions pédophiles ou gérontophiles de James Blake dans le Rêveur Illimité , c'est gonflant. Rien de plus , rien de moins ; se voulant premièrement artistique - et le livre est mentalement discernable , je le reconnais - tout ce discours de divinité New Age giclant sur les murs d'une banlieue Londonienne et expliquant qu'il veut fertiliser les petits trisomiques ou les vieilles en train de caner , ça lasse plus que ça fascine. Parce que , à mon gout , tout cela est très mal emmené.
L'action est interchangeable , par dessus le marché. A partir d'un certain nombre de chapitres , tant tout est dans une flottaison permanente au dessus du niveau conscience du lecteurs , il est tout bonnement possible de bondir d'un chapitre à l'autre sans être perturbé. J'ai d'ailleurs faits cette expérience , las de lire ce narrateur sexuellement échauffé en permanence , sans perdre un seul brin au déroulé de l'histoire.
Ça ne raconte pas grand chose , en somme. Mais Ballard est néanmoins talentueux. Je l'ais déjà dit plus tôt , mais il a réel talent pour décrire des scènes ou des environnements. Et c'est sans doute cela qui lui vaut , aujourd'hui , avec moi , la moitié des points.