Depuis qu’on l’a découverte avec le superbe "Pink Floyd" de Dominique Dupuis, on surveille de près les nouvelles sorties des Editions du Layeur consacrées aux discographies des « monstres sacrés » du Rock, histoire, c’est de saison, de choisir ce qu’on pourra placer sous le sapin familial, ou bien offrir à nos meilleurs amis. La publication d’un livre consacré à Leonard Cohen, qui est quelque part l’un des Dieux de notre Olympe personnelle, a fait monter la température d’un cran. La signature de Belkacem Bahlouli, journaliste musical réputé et aujourd’hui rédacteur en chef chez Rolling Stone, était qui plus est, une garantie de qualité.


Nul besoin, espérons le, de rappeler ici l’importance musicale – et tout simplement historique – de Cohen : nous le plaçons personnellement, en sachant que c’est un sacrilège, au-dessus même de Bob Dylan, tant par la grâce de sa poésie qui nous a souvent servi de boussole au fil des années que par la force de ses chansons, que nous avons vues capables de faire verser des larmes des milliers de personne simultanément lors de la fameuse et interminable dernière tournée du montréalais. Et aussi par cette espèce de présence incontournable – statue du commandeur, mais d’un commandeur bienveillant et pince-sans-rire – dominant la rock indie depuis les années 90. De plus, la discographie de Cohen étant, malheureusement, définitivement bouclée, la publication de ce volume faisait absolument du sens.


En parcourant le livre, on se rend compte – en gardant le "Pink Floyd" de Dupuis en tête comme référence – que la difficulté est beaucoup plus grande : après tout, nulle comparaison possible entre la splendeur des pochettes réalisées par Hypgnosis pour le Floyd, qui figurent parmi les meilleures de toute l’histoire du Rock, et celles, la plupart du temps très rudimentaires des disques de Cohen, qui visiblement ne s’intéressait pas particulièrement à l’emballage de ses chansons ! La plupart des pochettes compilées ici évoquent plus des souvenirs de grands moments d’intensité musicale vécus intimement que, littéralement, des œuvres d’Art que l’on aimera garder pour toujours chez soi dans un beau livre.


Plus ennuyeux sans doute est le fait que le texte, certes érudit, de Bahlouli, qui comporte d’ailleurs quelques coquilles, et un certain nombre de répétitions – quand les mêmes analyses reviennent entre la préface et les chroniques d’album, ou quand une chronique reprend littéralement les termes d’un (passionnant) interview ici publié -, ne répond pas à toutes nos attentes, sans doute trop hautes (on avait eu un problème similaire avec la BD "Leonard Cohen Sur un Fil" de Philippe Girard)… On regrette ainsi que les critiques des albums soient finalement assez superficielles, surtout pour la première période, la plus « classique » de Cohen, qui intéresse visiblement moins Bahlouli, et que certaines chansons capitales du poète ne bénéficient pas d’un minimum d’analyse, sans même parler de simples extraits des textes.


En refermant le livre, évidemment ravis par l’aspect anthologique qui est la grande qualité de la collection, et heureux de pouvoir classer ce livre dans notre discothèque (plutôt que bibliothèque, bien entendu), nous regrettons seulement de ne pas avoir senti de la part de Bahlouli le même amour pour Cohen que nous ressentons nous. Mais ça, c’était sans doute trop demander.


[Critique écrite en 2021]
Retrouvez cette critique et bien d'autres sur Benzine Mag : https://www.benzinemag.net/2021/12/21/leonard-cohen-de-belkacem-bahlouli-les-albums-du-canadien-errant/

EricDebarnot
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le 20 déc. 2021

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Eric BBYoda

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