Les Harmoniques célestes par Bobkill
Septième et dernier ?
Il ne faut pas voir dans le titre de cette critique ma volonté de voir se terminer cette superbe série de recueils des nouvelles de Jean-Claude Dunyach. Il est pour moi, et pour pas mal d'autres personnes, un des meilleurs nouvellistes mondiaux et on ne peut désirer qu'une chose : retrouver souvent cet auteur dans ce format où il excelle. Non, ce que je veux signifier c'est que lorsque je l'ai rencontré pour la dernière fois, il avait le désir de passer à un roman et j'étais donc convaincu que « Séparations » clôturait l'édition de ses nouvelles chez l'Atalante. Quelle ne fut pas ma surprise de découvrir ce septième volume intitulé « Les harmoniques célestes » !
Jean-Claude Dunyach est toujours déterminé à écrire un roman et je sais qu'il le fera. Tout ce qu'il a réalisé jusqu'à présent, seul ou avec son ami Ayerdhal, est réussi et je sais qu'il ne peut pas décevoir son lectorat. Il est une valeur sûre de la littérature de science-fiction et trouve toujours des voies inexplorées à exploiter avec brio. Ce recueil est composé de six nouvelles.
La première, « Les harmoniques célestes », est inédite. Une femme propose à un scientifique de participer à une expérience qui le hante depuis quelques années. Il a jadis expérimenté les NDE (Near Death Experience, expérience de mort imminente) et en a retiré des enseignements comme la vision de ce que les carcans religieux nomment paradis ou enfer. Il saura ruser pour imposer ses propres règles lors de cette expérimentation qu'on lui impose. Une astucieuse nouvelle de science-fiction qui renoue agréablement avec une thématique qu'on retrouve chez nombre de maîtres du genre. Second inédit de ce recueil, « La fin des cerisiers » nous présente un scénariste en déplacement au Japon avec toute une équipe de tournage. A force de modifier son script pour plaire aux uns ou aux autres, toute fidélité à l'esprit du Japon s'évapore. Peut-être la difficulté à trouver un cerisier qui lui conviendrait est un indice des périls qui se préparent. Une nouvelle que je n'arrive pas à rattacher à un genre.
Un homme se meurt dans « Les cœurs silencieux ». Il a jadis mis au point une molécule qui a changé toute l'humanité. Elle ne le sauvera pas de sa leucémie, mais au moins sait-il qu'il ne mourra pas seul. Une nouvelle à la fois technologique et profondément humaine. Ce n'est pas moins que le Prix Rosny Aîné 2008 qui a récompensé la nouvelle suivante. Dans « Repli sur soie », Richard va rencontrer un homme étrange qui va l'initier à cet art millénaire qu'est l'origami. Nous assisterons à son évolution et comprendrons comment un simple pliage peut aider à percevoir la complexité de l'univers. Une vie, un apprentissage servi par une plume de talent.
Avec « Aime ton ennemi », Jean-Claude Dunyach ne nous propose pas un message christique, mais plutôt une vision originale de la manipulation. En effet, dans un monde pollué au dernier degré, comment pourrait-on purifier la planète ? Si la solution consistait à utiliser un de nos autres ennemis, comment nous en débarrasserions-nous alors ? Une échelle sans fin s'offre à nous dans ce récit original de Jean-Claude Dunyach. L'auteur conclut ce recueil par une troisième nouvelle inédite qui s'intitule « Visiteur secret ». Quand un inconnu apparaît dans votre salon, cela n'est pas très agréable. Quand on ignore qui il est et pourquoi il est là, ça devient inquiétant. Pourtant la narratrice de cette nouvelle ne semble même pas étonnée et cela retire toute crédibilité à ce texte. Dommage.
Au fil de ces six nouvelles, Jean-Claude Dunyach nous prouve non seulement qu'il est capable de nous raconter n'importe quoi, mais qu'il sait toujours aussi bien le faire. Ce recueil honnête est agréable à parcourir, même si on sent que l'envie n'est plus la même que celles des premiers textes que l'Atalante a édités. On se doute que l'auteur à d'autres projets et j'ai vraiment hâte de les découvrir. Une fois de plus - faut-il le rappeler ? - l'illustration a été superbement servie par Gilles Francescano.
