Recueil de onze nouvelles, les « Contes myalgiques 1 » sous titrés « Les terres qui rêvent » sont une série plutôt sombre de nouvelles que nous devons à Nathalie Dau. Le premier de ces textes, s'intitule « La Femme, la sorcière et l'amour » et nous conte le sort de cette femme dont l'époux meurt dans de tragiques circonstances et qui se voit obligée de tenir le rôle qui est le sien dans cette Asie où les épouses devaient suivre leur mari sur le bûcher funéraire. Fort heureusement, celle qui nous est présentée ici a aussi commis un acte de bonté qui va lui permettre au travers de nouveaux sacrifices de retrouver l'amour perdu. Une belle histoire qui nous montre la force sous-estimée de l'amour des femmes et qui, sur un ton poétique, nous emmène vers de lointaines contrées et leurs traditions cruelles.

Dans « Bonne Année ! », c'est toute la responsabilité des rois qui est mise en avant. En effet, lorsqu'un enfant est reconnu comme étant l'incarnation du Dieu fondateur, il doit faire un choix peu aisé. Les rois se succèdent pour protéger le peuple et le garder ce qui le menace. Un choix, déjà peu évident pour un adulte, se pose alors à l'enfant. L'histoire est courte, mais porte une perspective étourdissante. « Aenor », quant à elle, est une fée qui garde une côte bretonne et protège les marins. Lorsque le roi tombe amoureux d'elle, elle ne saurait céder et quitter sa côte. Finalement, c'est le roi qui cède et s'installe auprès d'elle. Lorsqu'un enfant est à naître, il va peu à peu s'éloigner d'elle et finalement l'abandonner pour retrouver son royaume. On ne trahit pas une femme, et une fée encore moins, car les conséquences sont inimaginables.

La « Chicanerie » que Nathalie nous propose est un poème qui évoque le petit peuple et les relations parfois complexes qu'il entretient avec les humains. « Le Violon de la fée » lui a valu le Prix Merlin 2006. Il y est question d'une rencontre entre la narratrice et un conteur. Ce dernier va lui raconter l'histoire d'un luthier qui trouva la magie dans son art et su rendre à un homme sa dignité et un but dans la vie. Une bien belle histoire qui fait parfois le lien à celle plus sombre qui s'écrit avec une majuscule. Un texte majuscule donc qui mérite amplement la reconnaissance qui a été accordée à son auteure.

« Le Siestophage » est un court texte sur les apparences et les faux semblants. Dense et remarquable. Dans « Faux pas » nous suivons les aventures hilarantes de deux trolls amoureux. Nathalie a réalisé ici un texte plein d'humour qui m'a plu énormément. « Lucine » nous présente une princesse qui est victime d'inceste, un messager qui traverse une forêt dangereuse où ses prédécesseurs ont disparu. Au travers de ce conte dérangeant, l'auteure offre une vengeance aux femmes bafouées de tous les temps. N'est « Désespérée » que celle qui ne sait plus ce qu'est l'espoir. Mais quand on est la messagère de la mort, que peut-on espérer ? Une belle histoire, trop brève à mon goût.

« Demain les trottoirs » est un texte qui commence sur un ton poétique et qui ensuite nous parle d'un enfant des rues qui, depuis qu'il a capturé une fée, décide de devenir un tyran urbain. Mais la magie s'applique-t-elle impunément aux trottoirs ? Un texte original et plaisant. Dans « Vale Frater », Nathalie Dau nous pose la problématique suivante : de quel animal un chamane doit-il prendre la forme pour vaincre une sorcière qui sévit depuis la nuit des temps ? Cruelle et dépaysante, cette histoire est d'une grande originalité dans sa thématique, dans sa construction et son final surprenant.

La postface a été confiée à Jean Millemann Il nous parle donc de Nathalie Dau, de ce qui la motive et lui donne l'envie d'écrire. Il le fait sur un ton plein d'affection et avec une grande poésie. Il n'hésite pas à citer quelques-uns des nombreux textes de Nathalie pour illustrer ses propos. Un bien bel hommage. Une fois encore, les éditions Griffe d'Encre clôturent ce volume par une présentation de l'illustratrice, la talentueuse Magali Villeneuve. Un excellent recueil plein d'humour, de poésie et surtout de contes d'une grande modernité qui ravira le lecteur.
Bobkill
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le 4 sept. 2011

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