Voilà ce que, selon mes critères personnels, je désigne comme de la belle littérature érotique. Pas une once de pornographie, beaucoup de tendresse, une grande précision dans les descriptions sans pour autant nuire à la poésie du verbe et une approche subtile de la psychologie amoureuse.
George et Gauvain sont une femme et un homme parmi tant d'autres. Rien ne les prédestinait à s'unir, au contraire, tout concourrait à les séparer, et pourtant, par un canal mystérieux - une énigme depuis la nuit des temps -, c'est une passion des plus tenaces qui va s'acharner à les unir pour longtemps.
Une passion certes amoureuse mais avant tout sexuelle et assumée comme telle. Ce roman déborde d'érotisme, le sexe habite chaque ligne, ponctue chaque phrase. Avec la volonté de lui donner une saveur unique, Benoîte Groult décrit l'acte charnel avec précision mais sans aucune vulgarité, une prouesse d'écriture.
Ce roman parle de George, de Gauvain, deux êtres différents et pourtant reliés par un G majuscule, point d'ancrage dans le plaisir mutuel reçu et donné dans la joie et la sincérité, sans fausse pudeur ; centre de gravité du seul lieu - le lit - où ils peuvent s'accorder à la perfection pour vibrer au son d'une même musique, celle de leurs corps fusionnés.
En parlant de sexe, Benoîte Groult parvient à ne parler que d'amour et c'est juste, et c'est beau. Même si j'ai eu quelques difficultés à m'attacher à George que j'ai trouvée trop condescendante et infatuée de son importance, elle a fini par me séduire lorsqu'elle s'est découverte humble et impuissante devant l'absolu de l'Amour.
"Les vaisseaux du cœur" est un récit de voyages, de rencontres, d'aéroports, de parenthèses, de départs, de retours au port, de retrouvailles, de (ré)jouissances, d'abandons... imaginés par une auteure anticonformiste et très certainement féministe au sens noble du terme, c'est-à-dire qui place la femme à côté de l'homme sans chercher à le nier ou à l'abaisser pour le dominer à son tour, dans un esprit de revanche stérile.