Les Visages par H0lycheat
Je pense qu'il est impératif pour moi de préciser quelques petits points avant de soumettre cette critique : je ne raffole pas, mais pas, mais du tout, du style policier thriller suspens bizarre mais pas trop, que ce soit en littérature, en film, en jeu ou quoique ce soit (les histoires sordides réelles sont bien plus fascinantes lolilol). Je déteste cette manière admise et encouragée d'entraîner le lecteur ici, pour le faire passer à côté de là et envisager (envisager plus que deviner) les tenants et les aboutissants de la noire trame de la sombre histoire, lugubre et désenchantée de personnages blasés ou dépressifs. C'est le style, comme en vidéo, qui a le plus de succès. Soit. Qui suis-je pour juger de la qualité d'un genre par rapport à un autre après tout ? C'est simplement mon ressenti ; en gros, je trouve cela, dans l'ensemble, très lourd et que c'est un peu jouer sur le manque d’imagination du public. Cela dit, c'est paradoxalement (dans ma réflexion) un style qui éveille l'intérêt et va même pousser certaines personnes à créer ces timelines de possibilités et de spéculations. Et ça, je trouve que c'est ce qui transcende cette catégorie qui m'ennuie assez. Donc, bien que partagé, je m'efforce de toujours aborder ce qui attire mon attention avec un regard nouveau, comme un enfant, presque. L'enfance, d'ailleurs, constitue un des thèmes capitaux de ce livre.
Oh, il y a quelque chose d'autre que je déteste, je crois que c'est cette ****** ** ****** ** ***** de notion d'art. Je ne m'attarderais pas là-dessus, me contentant seulement de préciser que le verbe '' attarder '' ici est plus que lourd de sens. Alors, merci à Monsieur Kellerman de faire dire à son protagoniste principal qu'il n'est pas non plus un fan du genre, et qu'en tant que galeriste, forcément désillusionné par le business artistique (inversement proportionnel). Bon, j'ai beau être d'accord sur le fond, ce n'est pas du tout pour ces raisons que j'ai autant apprécié ce roman. Ça a simplifié, par contre, mon immersion dans son univers et j'ai pu plus facilement me concentrer sur... ben l'histoire. Oui. C'est risible aujourd'hui, de ne pas avoir d'autre ambition que de lire un livre qui nous transporte. Il n'y a pas de prétention philosophique, religieuse, politique ; normal, c'est un roman, mais les genres dans lesquels les auteurs font leurs expériences sont parfois tellement encadrés (les codes, les méthodes, les papiers toilette...) que... bah... changez les noms, les prénoms tant qu'à faire (et encore), les lieux (et encore), grosso modo, la progression de l'intrigue est souvent similaire. Cela fonctionne pour la plupart des styles. Donc là encore, simple constat, même parmi les genres que j'affectionne.
Ici donc l'intrigue est sympathique et simple. Pas besoin d'aller chercher midi à onze heure trente. Tant mieux, parce que s'il s'était agit (quand on connaît l'histoire) en plus se casser la tête, ç'aurait été comparable à un manuel universitaire. Les éléments les plus incontournables de l'enquête policière sont présents, et malgré tout ce que je pourrais laisser croire, on les aborde avec plaisir, certaines situations nous font sourire tant elles sont attendues et/ou parodiées. On n'est, en tant que spectateur, pas toujours à même d'assister le protagoniste ou d'autres enquêteurs avec autant d'implication que dans un classique du genre. « Laissez la police faire son travail », après tout. C'est ce qui donne cette touche un peu linéaire en fait, et cela peut en dérouter quelques-uns. Les puristes se moqueront certainement, et les newbies des polars seront content parce que c'est une histoire de malade (dans deux sens du terme). Parce que oui, l'histoire est forte, la narration intéresse grâce au cynisme d'Ethan et l’enchaînement des chapitres relatant la généalogie d'une famille aux nombreux secrets. Je suis pas fan non plus de ce type de cliché, mais ce n'est qu'un prétexte pour introduire le génie (titre original d'ailleurs, « the genius ») d'un artiste. Pardon, c'est contradictoire avec ce que j'ai écrit au début ? Normal.
Cette critique n'est pas un travail universitaire (je déteste les casse-têtes. Oui, ça aussi) donc la nature même de l'art... de toute façon j'ai horreur de ce mot et de 95% de significations qu'on lui attribue. Mais j'ai trouvé un peu de ces 5% restants dans le personnage de Victor Cracke. Voilà comment je résume en trois lignes ce qui, dans ma tête, constitue une infinité de paragraphes à la véracité plus que douteuse. Je ne suis pas une personne passionnée par l'art parce que je ne raffole pas de la matière fécale ; non plus par les thriller parce que la réalité sublime tout ce qui dans ce genre est couché sur papier. Par contre, je me bats tous les jours pour garder, dans mon jugement, un part d'infantilisation et me perdre, seul, dans l'immensité d'une création. C'est quelque chose de souvent angoissant, mais c'est ce qui m'a autorisé une fascination précoce pour Cracke.
Donc ce livre n'est clairement pas à lire avec des attentes précises, ni avec prétention. C'est une histoire : on aime ; on n'aime pas. Même sans risques pris, la polémique émerge de la diversité des opinions. Tant mieux, mais on ne peut pas rester indifférent devant certaines fatalités ; ce qui, de mon point de vue, est '' un poil '' plus important que catégoriser une production ou un domaine.