Merci parrain
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Voilà ce que m'a répondu le libraire lorsque j'ai voulu commander ce petit bijou pour mes neveux.
-Je sais bien qu'il est épuisé Monsieur, mais vous n'avez rien d'équivalent ?
-Cela fait 20 ans qu'on n'édite rien d'aussi beau Madame. Ça ne se fait plus, terminé !
-Même chez Gründ ?
-Non !
Là, j'ai vu qu'il commençait à s'énerver. Pourtant, pour avoir bu mon canon de rouge avec des moules en lisant Lamartine à la brasserie à midi pendant qu'il buvait le sien deux tables plus loin en fumant clope sur clope devant Le Royaume, je savais que le libraire n'était pas en prémisse de delirium tremens. Les signes du manque visibles dans son attitude physique fébrile n'étaient pas ceux de la nicotine ni ceux de l'alcool. Seulement ceux du LIVRE.
J'ai hoché la tête gravement et laissé une larme perler sur la joue droite. Il s'est radouci et ses yeux sont devenus humides. Le libraire m'aime bien depuis que je lui ai commandé l'intégrale de Rutebeuf. Il n'en avait jamais vendu en dix ans... Il m'a orientée vers Grimm, toujours chez Gründ, moins bien relié, moins bien illustré.
Alors le livre. Un petit bijou qui a juste deux ans de moins que moi. C'est mon petit papa qui me l'a offert il y a 27 ans. Il est intact, seule la jaquette a disparu lors d'un déménagement. C'est une merveille en terme d'objet d'art et de littérature. Vingt récits, un pour chaque jour et un épilogue. Vingt minutes chaque soir de voyage en famille dans un autre monde, un autre temps, l'ailleurs seul fourni par le LIVRE. Mes enfants ont adoré comme je l'ai adoré aussi. Depuis Troie en flammes jusqu'à la brumeuse Bretagne, d’Énée à Lancelot, du château de Pergame au Graal en passant par la tombe d'Yseult... L'Europe, le monde helléno-chrétien dans ce condensé de mythes offert aux enfants ainsi qu'à leurs parents. C'est sublime, si beau que même mes petits ne l'ont pas abîmé, pas une page cornée ! Les illustrations sont de toute beauté, les dragons et autres géants terrifient petits et grands, le fracas des boucliers et des épées surgit des pages, le sang dégouline parfois du champ de bataille... Escalibor, la croix qui fend les pages. Et la langue, la belle langue, point trop passéiste mais suffisamment relevée afin de faire voyager en ces contrées étranges en compagnie d'une multitude de héros et d'autant de contes.
Ce qui me plaît le plus, surtout maintenant que je suis « grande » (à ce qu'il paraît) ce sont les couleurs froides, le timbre sombre de l'histoire, la dépression. Il paraît aussi que la « matière de Bretagne » est la première œuvre littéraire traitant de la dépression propre à nos latitudes dépourvues de soleil. Cela est certain dans ce récit et ces images.
Il parait même que des fous vendent ce qui ne se fait plus 15 euros d'occasion sur le net. Courez braves gens, courez vite vous plonger dans l'Europe et ses tourments.
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Créée
le 24 oct. 2017
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