Anne Tursz est pédiatre et épidémiologiste française, directrice de recherche à l'INSERM. Dans ce livre, elle tente d'alerter sur la sous-estimation des cas de maltraitance en France, et fait le point sur les dispositifs de signalement et de prise en charge.
Sceptique quant aux données officielles sur la maltraitance, l'auteur s'est livrée à sa propre enquête à partir de dossiers médicaux et judiciaires. Sa conclusion est sans appel : les chiffres sont largement sous-estimés, car une grande partie des cas de maltraitance ou de morts violentes ne sont pas répertoriés comme tels.
Elle s'intéresse également aux politiques publiques de surveillance et de prévention de la maltraitance. Et ça fait très mal. Manque cruel de moyens, absence de communication entre les diverses instances concernées, méconnaissance des facteurs de risques (on se focalise sur le niveau social des parents, alors que les facteurs de risque sont avant tous d'ordre psycho-affectifs), la liste est longue...
Un livre coup de poing, qui mériterait à mon avis plus d'échos. La première partie (qui décrit l'enquête et ses modalités, et donne donc de nombreux exemples de cas concrets de maltraitance étudiés par l'auteur) m'a fait l'effet d'un véritable livre d'horreur. Mais c'est surtout le constat d'impuissance et d'aveuglement face à ce phénomène qui est glaçant. Il ne s'agit pas de stigmatiser les parents (dont certains sont en grande détresse psychologique), mais de se demander pourquoi la société ne se donne pas les moyens de repérer ces parents fragiles, et de les aider avant qu'ils ne dérapent - ou de sauver les enfants quand les choses sont allées trop loin.