Heureusement pour moi, je suis tombé, en brocante, sur la version des éditions JCLattès avec une couverture neutre qu'on leur connaît et qui ne distille aucune révulsion. Car la photo de couverture reprise pour ce livre sur le site Sens Critique ne m'aurait aucunement donné envie de l'ouvrir.
"Les poissons ne connaissent pas l'adultère", un titre de plus qui ne signifie rien, pas grand chose, mais qui accroche tant on ne sait trop où on va.
Carl ADERHOLD signe ici son second roman (après Mort aux cons -2007). Je trouve ce roman sans prétention, ce qui, in fine, en fait son intérêt. Julia prend le train... A défaut, pour Toulouse où elle a une cousine. Mais, en fait, elle ne va pas à Toulouse, elle quitte sa vie, son petit monde étriqué et sans rêve, son boulot qui ne l'épanouit pas. Elle a la quarantaine, période difficile selon les psy-machin et les auteurs qui en font leurs choux gras. Par un concours de circonstances liées aux copines, à son mari qui boit et râle plus qu'il ne la regarde ('Il ne s'intéresse jamais à elle. Mais quand il ne sait pas où elle est ... Elle n'existe à ses yeux que par ses absences', elle se met en absence, elle s'en va, se quitte pour tenter de se retrouver. Et tout est dit.
Julia va vivre un voyage peu commun, quasi en huis clos, dans un compartiment des chemins de fer où l'auteur, en quelques traits de plume nous campe les anti-héros de notre monde. Il y a le docte universitaire carriériste et sa femme qui accepte tout, le copain du maître, tout autant chercheur mais beaucoup moins arriviste et plombé par sa timidité et son abnégation. La femme de ce dernier est aussi nunucche que l'autre mais en beaucoup plus inquisitrice. Et puis, ci et là dans le train, il y a Dick et sa chorale, le sourd-muet, ténor de classe, Jean-Pierre le dragueur de service, quelques autres et, finalement, le bon Monsieur Loyal, le chef train qui se départira de son titre de contrôleur pour revendiquer, ô combien à juste titre, l'appellation d'agent de solidarité ferroviaire!
C'est bourré de niaiserie, de tendresse, d'un regard qu'on voudrait pouvoir porter sur le monde des transport en commun et sur les rencontres qu'il ferait bon d'y faire.
Le scénario nage dans le surréalisme fou, la fin, bien que prévisible, est digne d'une dernière image de film guimauve à passer en TV durant la trêve des confiseurs.
Ce livre ne serait qu'un bouquin ... s'il n'y avait, derrière, une critique douce-amère mais assez juste des liens qui trop souvent se tissent au sein des couples, des relations professionnelles et des rencontres fortuites.
Si la vie ne devait être qu'un voyage en train, prendre celui-là ne serait pas pire que bien des destins!