Les Terroristes
de Maj Sjowall & Per Wahlöö
(1975) [éd. Rivage Noir]
Une écriture talentueuse dans l'art des descriptions minutieuses (tenues, décors, gestes, et cetera) qui met en relief le caractère des personnages et les tensions des diverses situations. Beaucoup de détails. Le lecteur peut d'ailleurs faire le lien entre certains d'entre eux et faire sa propre (contre-)enquête.
Sans crier gare (page 36), les auteurs envoient une assertion politique fulgurante, comme un cheveu sur la soupe: "En dépit de toutes les autres différences, ce pays était, comme la Suède, une pseudo-démocratie régentée par une économie capitaliste et des politiciens cyniques, attachés à donner au régime l'apparence d'une sorte de socialisme de pure façade."
Puis, on assiste au tableau truculent d'un procès pour "braquage". Une occasion réussie pour introduire des personnages.
Voilà c'est le début, et c'est tout. Tout ce qu'il y a à retenir de cet ouvrage c'est : Rebecka Lind. Point.
L'écriture fait preuve de maladresses grossières comme ces interrogations directement adressées ou prêtées au lecteur; ou encore ces points de vue de meurtrier/terroristes qui sont des ratés totaux.
On a un personnage principal froid qui erre comme un zombie sans but. Sans vie ni cellules grises, il est décrit comme l'un des meilleurs du bureau.
Aucune compassion requise ici envers les victimes (banquiers paranos, pornographe vicieux, hommes politiques honnis), pas même leurs proches puisque ceux-ci sont carrément absents. Personne ne réclame justice. Un récit dépourvu de tout enjeu. - l'attentat à venir? j'y reviendrai plus tard -
En conséquences, le résultat est édifiant: contradictions, lacunes, et incohérences jonchent le roman de tares narratives fort regrettables
Franchement, il est dit, comme souvent et à juste titre, que les enquêtes sur un meurtre ne doivent pas traîner (témoignages changeants, disparition d'indices avec le temps, etc...). Qu'est-ce que Maj Sjowall & Per Wahlöö en font? Un riche est assassiné chez sa maîtresse: la police non seulement ne suspecte pas la veuve (une semaine d'attente pour l’interroger)[!] mais la laisse les envoyer bouler. Il venait de refuser de venir témoigner dans un procès: ne cherchons pas de ce côté non plus! (six mois d'attente pour lier les deux faits) [!] Comme de brillants enquêteurs n'ont finalement qu'à attendre que le roman suive son cours....
Le parti pris de la rétention d'informations par les auteurs ne suscitent aucun suspense mais un ennui abyssal.
Aucun détail sur les préparatifs de l'attentat, ni, de l'autre côté, sur l'enquête concernant ces préparatifs. Les auteurs choisissent d'être laconiques. Donc on se fait chier, on attend, on bâille page après page. Que les terroristes échouent ou réussissent importe peu: on ignore tout du dispositif mis en place (autant de la part des terroristes que des forces de l'ordre).
Un terroriste sur-entraîné avec une arme décrite comme exceptionnelle. Voyons, pourquoi s'en servirait-il pour accomplir ses objectifs? P. 526: "Il se dit qu'il avait encore du temps devant lui et qu'il pouvait toujours voir ce qui allait se passer" [sic!] Le coup de grâce, j'avoue, ça m'a achevé.
Sans oublier: (p.251) "Le but principal [de cette organisation terroriste] était [...] de venir prêter main forte aux régimes blancs, de plus en plus affaiblis, en Afrique méridionale." Or, la plupart des attentats qu'ils ont revendiqués ne semblent en rien servir cette cause! Ou alors faudrait m'expliquer.
Fumisterie sur 550 pages. Voilà c'est la fin, et c'est tout. Tout ce qu'il y a à retenir de cet ouvrage c'est : Rebecka Lind. Point.