J’avais bien aimé le volume précédent de Belgique, terre de l’étrange, un peu moins ce tome 3. Le principe reste le même : une anthologie de nouvelles fantastiques belges, d’auteurs relativement connus (Jean de Boschère, Michel de Ghelderode, Jean Ray), ou tirés d’un oubli parfois presque complet (Irène Hamoir, Éric de Haulleville, Franz Hellens, Marcel Lecomte, Thomas Owen, Alex Pasquier, Robert Poulet, Marcel Thiry, Gustave Vanzype).
À mettre au crédit de ce volume, une introduction intéressante, qui dépasse volontiers le cadre de la littérature belge pour proposer une réflexion sur les « littératures de l’imaginaire » et leur perception des deux côtés de la frontière : difficile de donner tort au préfacier lorsqu’il affirme qu’en France, « Diverses tendances, nées paradoxalement du désir d’intégrer le merveilleux et l’aventure, contribuent à exclure le fantastique des formes littéraires légitimes et à réorganiser l’ensemble de la production insolite selon un système de catégories multiples, étanches les unes aux autres » (p. 19), tandis que « l’une des singularités majeures de la production littéraire belge » est précisément « la capacité qu’ont les auteurs à faire s’interpénétrer des catégories censément étanches les unes aux autres » (p. 33).
C’est ce que semblent en tout cas montrer ces histoires, à rapprocher tantôt de la nouvelle « fin-de-siècle » à la Villiers-de-L’Isle-Adam (« Le Peintre Émile Feu », publié en 1941 tout de même !), tantôt de la science-fiction ou du fantastique « de gare » (« Une histoire d’automates », « La Fiole jaune »), tantôt de la descente aux enfers plus ou moins kafkaïenne (« La Couleur »), borgesienne (« Les Fouilles », « Un rite de la solitude ») ou dickienne (« Au repos de la Santé », « Non-lieu », « Le Briquet »), tantôt du grand-guignol (« La Cuve infernale »), tantôt de rien de connu (« Pantagleize », « J’entends crever ces bulles »)… Pas étonnant, du reste, que Breton soit évoqué en introduction, et que Marcel Lecomte ou Irène Hamoir figurent aussi dans une Anthologie du surréalisme belge.
La qualité littéraire en est variable. Si certaines pages, certains paragraphes, certaines phrases, certaines formules disséminés çà et là peuvent faire mouche – j’aime bien, par exemple, « “C’est ridicule” crie en moi la voix de la raison. “C’est imprudent” me dit une voix qui est, elle aussi, celle de la raison. » (dans « Non-lieu », p. 268), « je suis vraiment un poisson agonisant, mais je ne doute pas que je suis mort » (dans « J’entends crever ces bulles », p. 354) ou le bel incipit que constitue « Le peintre Émile Feu n’avait pas toujours peint des dindons sur les consoles. » (p. 369) – il reste cependant difficile de trouver ici un texte vraiment inoubliable.

Alcofribas
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le 16 avr. 2017

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