Ils ne comprennent rien, se disait-il. Ils sont incapables de voir, comme moi, que tout, dans la vie, absolument tout, cache un arrière plan de souffrance. Ce sont des optimistes creux. Ils sourient parce qu'ils s'imaginent qu'ils seront heureux jusqu'au bout ... Oh! Et puis quoi.
Il rêvassait, presque endormi, déjà.
-Demain, j'irai à la campagne, à Rye, j'y affronterai plus de sourire encore qu'ici, plus de chaleur qu'ici. C'est ça, la vie, simplement ça - sourires, chaleurs, sourires, chaleurs.
J'ai récemment découvert Francis Scott Fitzgerald avec son beau roman Gatsby Le Magnifique et je ne peux pas être déçu par ce recueil de nouvelles. Ce n'est pas qu'elles soient extraordinaires ou sublimissimes, mais plutôt que cet auteur formidable, dont le talent confère au génie, répond à toutes mes questions les plus intimes. Fitzgerald appartient bien à cette école littéraire qu'il convient de nommer : la Génération perdue, c'est-à-dire ces écrivains ayant vécu la guerre dans leur jeunesse ainis que les années folles. Ces jeunes gens sont confrontés à un manque de transcendance d'une société ultra-libérale, qui ressemble franchement à notre génération actuelle à l'aube des années 2020. Sa sensibilité extrême qui permet de sonder subtilement et sans caricature les travers humains, avec une bienveillance et un tragique loin d'être imbécile est remarquable. Les inégalités sociales, le couple et la superficialité de la jeunesse de l'East Side sont dépeints avec une grande intensité.
Le style de Fitzgerald est toujours aussi abouti, et les dialogues sont très bien orchestrés. Chaque nouvelle est travaillée comme une oeuvre d'artisan. D'ailleurs, l'écrivain les écrivait pour vivre, un peu comme les bijoux du bijoutier. Ces morceaux de sincérité et de beauté sont éternels, placés là aux yeux de tous sans atours inutiles. Love Boat répond à des questions essentiels et métaphysiques de la société capitaliste, et de la place de la spiritualité dans cette société de vacuités.