Indéniablement, il faut reconnaître à Nico Bally une imagination pleine de fantaisie et un attrait sincère pour la magie et le surnaturel. Il livre ici un court roman d'action et d'aventures, aux rebondissements quasi incessants.

Didactique, "Lucie Corvus contre Mister Poiscaille" est également un bon support éducatif pour décider les enfants à consommer plus de fruits et de légumes tout en les charmant par le spectacle d'une héroïne à l'image de la plupart d'entre eux, généralement peu curieux des innovations culinaires et plus prompts à choisir le nuggets-frites que le merlu-haricots.

L'un des points positifs de ce roman jeunesse est d'ailleurs d'ancrer le quotidien de la jeune Lucie dans la réalité : mixité sociale, parents solo ou divorcés, difficultés scolaires, premières introspections existentielles, approche des différences, etc. Entre les pages de ce roman, vous ne trouverez pas en effet de parfaites familles princières vivant dans un château plein de petites filles blondes aux bijoux étincelants et de petits garçons voulant se transformer en crapaud, histoire de se faire embrasser par de jolies bergères. Au contraire, Lucie vit seule avec sa maman - serveuse, toujours absente et ne connaissant rien aux aires des triangles - et Magma, son chat borgne télépathe. Cela ne l'empêche ni de rêver ni de vouloir protéger ceux qu'elle aime... Un angle narratif bien rafraîchissant !

Pour ce qui est de l'intrigue, le récit semble ouvertement inspiré de l'univers d'Harry Potter jusqu'à son dénouement plutôt noir, un trait caractéristique des romans de J. K. Rowling. Au fil de ma lecture, j'ai souvent eu l'impression de lire soit un roman un peu trop court soit une nouvelle un peu trop longue, avec, dans les deux cas, un rythme de narration irrégulier. En effet, après un démarrage très fort et véritablement enthousiasmant - placé sous le signe de l'humour, j'étais d'ailleurs morte de rire - le développement de l'intrigue m'a semblé plus laborieux et l'action moins enlevée pour regagner en puissance seulement vers la fin. La galerie des personnages aurait gagné à être plus fouillée ; je ne me suis malheureusement réellement attachée à aucun d'eux. L'humour reste donc pour moi la meilleure composante de ce roman jeunesse qui aurait mérité de plus amples développements. Dans le domaine fantastique, à noter quelques belles trouvailles comme le fait de rétrécir choses et gens plutôt que de les faire disparaître.

La plume est agréable, très facétieuse*, mais Nico Bally semble avoir hélas un sérieux problème avec la conjugaison (notamment avec la différenciation du présent du conditionnel et du futur de l'indicatif), ce qui pour un auteur est tout de même aussi capital que de connaître l'aire des triangles pour un prof de maths...

* L'éditrice jeunesse que je suis confesse toujours autant tordre le nez devant l'usage répété de mots tels que "bouffe" ou "foutus" dans un texte destiné aux enfants de 10 ans. Hormis ce bémol, côté style, rien à redire.
Gwen21
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le 7 oct. 2014

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